Les travaux de la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération se sont poursuivis mercredi et jeudi dans un climat toujours tendu, au travers d'une bataille d'amendements, notamment dans le Comité I chargé du désarmement, visant essentiellement de la part des pays nucléaires à affadir et vider de leur contenu concret les propositions contenues dans les textes-brouillon en circulation.
Ce travail de sape, dont lequel s'est illustrée la représentation française, a visé notamment à faire supprimer toute référence à des engagements datés ou quantifiés. Nous sommes devant un paradoxe : alors que que les garanties de sécurité de l'AIEA contre la prolifération doivent être signés et respectés dans un délai de 90 jours et suivant des modalités précises, rien de tel n'existe pour les obligations de désarmement : pas de calendrier, pas de modalités ni de définitions précises, ce qui permet toutes les interprétations qui contournent le traité comme les essais en laboratoire, la "modernisation" des armes nucléaires, etc...
Sous la pression des États nucléaires, de nouveaux textes-brouillons ont été mis en circulation, mais les compromis trouvés portent la marque du "pressing" mené par les puissances nucléaires.
Un premier brouillon a été diffusé mercredi, émanant du sous-comité I, chargé de travailler sur le plan d'action en 26 points qui désormais en compte 24. De nombreuses formulations ont été diluées : ainsi, l'action 6 qui disait que les puissances nucléaires "devaient convenir de consultations pas plus tard qu'en 2011 pour accélérer des progrès concrets du désarmement nucléaire" s'est transformée en "sont appelées à convenir de consultations en temps opportun". Le premier document disait que les puissances nucléaires devaient rendre compte aux États-parties en 2012, cela devient "dans le cycle courant du TNP" (2010-2015). Au lieu que le Secrétaire Général des Nations-Unies décide "d'une Conférence internationale en 2014 pour examiner les moyens d'adopter une feuille de route pour l'élimination complète des armes nucléaires dans un calendrier précis, incluant le moyen d'un instrument juridique légal et universel", le texte invite le Secrétaire général à décider "d'une réunion ouverte de haut-niveau pour prendre en compte et accepter une feuille de route pour l'élimination complète des armes nucléaires, incluant le moyen d'un instrument juridique légal et universel" (plus de calendrier). À noter également que dans l'action 7, concernant les discussions à la Conférence du Désarmement, il est proposé que soit créé "un organe subsidiaire, dans le contexte d'un programme de travail accepté, complet et équilibré" ce qui revient, compte-tenu des oppositions à la CD, notamment de la part du Pakistan, opposé à tout accord sur les matériaux fissiles, à enterrer les discussions sur le désarmement nucléaire dans cet organe, qui d'ailleurs, n'aurait pour but que de fournir un forum pour échanger "des vues et approches vers un futur travail potentiel de caractère multilatéral". Clair, n'est-il pas ?
Après ce texte-brouillon du sous-comité I, le Président du Comité I a fait circuler jeudi une deuxième version du texte général sur le désarmement qui traduit les mêmes tendances : réduction de la notion d'urgence du processus de désarmement nucléaire (remplacement de l'appel à l'implémentation de l'article VI dans un calendrier précis à l'affirmation que "la phase finale du processus de désarmement nucléaire (...) devra se poursuivre dans un cadre légal avec des échéances spécifiées". C'est-à-dire, oui à des échéances mais quand le moment sera venu... or, il ne l'est pas encore, selon la France ou les États-Unis par exemple..
Les références au Secrétaire Général des Nations-Unies ont été supprimées dans ce texte général bien qu'elles demeurent pour l'instant dans le brouillon du sous-comité
Une troisième version du texte-brouillon du Comité I est attendue pour lundi prochain : contiendra-t-elle des compromis, certes plus faibles que le texte originel, mais permettant quand même, de maintenir une impulsion au processus de désarmement nucléaire, ou au contraire enterrera-t-elle les espoirs en un revitalisation du TNP ? Beaucoup dépendra du niveau de lucidité des puissances nucléaires qui devraient comprendre qu'en se cramponnant becs et ongles à leur domination nucléaire, elles remettront en cause non-seulement le succès de la Conférence d'examen mais aussi la confiance que la communauté internationale a dans le TNP.
Le débat dans les deux autres Comités (prolifération et énergie civile) semble pouvoir aboutir à des compromis plus équilibrés. Une deuxième version des textes-brouillons a été également publiée ce jeudi. Dans le Comité II, des formules ont été trouvées même s'il reste encore des efforts à faire, notamment sur le statut à donner aux Protocoles additionnels de l'AIEA. Pour l'instant, rien n'est écrit sur la question d'une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen-Orient, pour laquelle des discussions continuent à part, notamment entre les cinq puissances nucléaires et l'Égypte et les pays de la Ligue arabe.
Dans le Comité III, des désaccords demeurent mais les échanges montrent qu'un consensus pourra peut-être trouvé.
L'action restera donc centré sans doute la semaine prochaine, qui sera la semaine finale, sur les discussions autour du désarmement et du plan d'action en 24 ou 26 points. Beaucoup de pays et d'ONG espèrent que certains des points du texte original pourront être réintroduits partiellement. Les "13 étapes" de 2000, malgré leur relative précision, ont pû être manipulées par des pays nucléaires comme la France et la Grande-Bretagne, qui ont proclamé qu'ils les avaient intégralement respectées. Il serait dommageable que "24 actions" encore moins précises, puissent, elles aussi, donner lieu plus tard à toutes les interprétations et contournements imaginables par les puissances nucléaires.
21 mai 2010
Ce travail de sape, dont lequel s'est illustrée la représentation française, a visé notamment à faire supprimer toute référence à des engagements datés ou quantifiés. Nous sommes devant un paradoxe : alors que que les garanties de sécurité de l'AIEA contre la prolifération doivent être signés et respectés dans un délai de 90 jours et suivant des modalités précises, rien de tel n'existe pour les obligations de désarmement : pas de calendrier, pas de modalités ni de définitions précises, ce qui permet toutes les interprétations qui contournent le traité comme les essais en laboratoire, la "modernisation" des armes nucléaires, etc...
Sous la pression des États nucléaires, de nouveaux textes-brouillons ont été mis en circulation, mais les compromis trouvés portent la marque du "pressing" mené par les puissances nucléaires.
Un premier brouillon a été diffusé mercredi, émanant du sous-comité I, chargé de travailler sur le plan d'action en 26 points qui désormais en compte 24. De nombreuses formulations ont été diluées : ainsi, l'action 6 qui disait que les puissances nucléaires "devaient convenir de consultations pas plus tard qu'en 2011 pour accélérer des progrès concrets du désarmement nucléaire" s'est transformée en "sont appelées à convenir de consultations en temps opportun". Le premier document disait que les puissances nucléaires devaient rendre compte aux États-parties en 2012, cela devient "dans le cycle courant du TNP" (2010-2015). Au lieu que le Secrétaire Général des Nations-Unies décide "d'une Conférence internationale en 2014 pour examiner les moyens d'adopter une feuille de route pour l'élimination complète des armes nucléaires dans un calendrier précis, incluant le moyen d'un instrument juridique légal et universel", le texte invite le Secrétaire général à décider "d'une réunion ouverte de haut-niveau pour prendre en compte et accepter une feuille de route pour l'élimination complète des armes nucléaires, incluant le moyen d'un instrument juridique légal et universel" (plus de calendrier). À noter également que dans l'action 7, concernant les discussions à la Conférence du Désarmement, il est proposé que soit créé "un organe subsidiaire, dans le contexte d'un programme de travail accepté, complet et équilibré" ce qui revient, compte-tenu des oppositions à la CD, notamment de la part du Pakistan, opposé à tout accord sur les matériaux fissiles, à enterrer les discussions sur le désarmement nucléaire dans cet organe, qui d'ailleurs, n'aurait pour but que de fournir un forum pour échanger "des vues et approches vers un futur travail potentiel de caractère multilatéral". Clair, n'est-il pas ?
Après ce texte-brouillon du sous-comité I, le Président du Comité I a fait circuler jeudi une deuxième version du texte général sur le désarmement qui traduit les mêmes tendances : réduction de la notion d'urgence du processus de désarmement nucléaire (remplacement de l'appel à l'implémentation de l'article VI dans un calendrier précis à l'affirmation que "la phase finale du processus de désarmement nucléaire (...) devra se poursuivre dans un cadre légal avec des échéances spécifiées". C'est-à-dire, oui à des échéances mais quand le moment sera venu... or, il ne l'est pas encore, selon la France ou les États-Unis par exemple..
Les références au Secrétaire Général des Nations-Unies ont été supprimées dans ce texte général bien qu'elles demeurent pour l'instant dans le brouillon du sous-comité
Une troisième version du texte-brouillon du Comité I est attendue pour lundi prochain : contiendra-t-elle des compromis, certes plus faibles que le texte originel, mais permettant quand même, de maintenir une impulsion au processus de désarmement nucléaire, ou au contraire enterrera-t-elle les espoirs en un revitalisation du TNP ? Beaucoup dépendra du niveau de lucidité des puissances nucléaires qui devraient comprendre qu'en se cramponnant becs et ongles à leur domination nucléaire, elles remettront en cause non-seulement le succès de la Conférence d'examen mais aussi la confiance que la communauté internationale a dans le TNP.
Le débat dans les deux autres Comités (prolifération et énergie civile) semble pouvoir aboutir à des compromis plus équilibrés. Une deuxième version des textes-brouillons a été également publiée ce jeudi. Dans le Comité II, des formules ont été trouvées même s'il reste encore des efforts à faire, notamment sur le statut à donner aux Protocoles additionnels de l'AIEA. Pour l'instant, rien n'est écrit sur la question d'une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen-Orient, pour laquelle des discussions continuent à part, notamment entre les cinq puissances nucléaires et l'Égypte et les pays de la Ligue arabe.
Dans le Comité III, des désaccords demeurent mais les échanges montrent qu'un consensus pourra peut-être trouvé.
L'action restera donc centré sans doute la semaine prochaine, qui sera la semaine finale, sur les discussions autour du désarmement et du plan d'action en 24 ou 26 points. Beaucoup de pays et d'ONG espèrent que certains des points du texte original pourront être réintroduits partiellement. Les "13 étapes" de 2000, malgré leur relative précision, ont pû être manipulées par des pays nucléaires comme la France et la Grande-Bretagne, qui ont proclamé qu'ils les avaient intégralement respectées. Il serait dommageable que "24 actions" encore moins précises, puissent, elles aussi, donner lieu plus tard à toutes les interprétations et contournements imaginables par les puissances nucléaires.
21 mai 2010
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