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mercredi 9 mai 2018

Les limites de la vision du monde d'Emmanuel Macron

Le Président de la République, Emmanuel Macron, a confié dans une interview au Journal du Dimanche du 6 mai, sa vision du monde et des relations internationales aujourd'hui.
Trois semaines après les bombardements aériens français controversés en Syrie, dix jours avec sa séance, à la limite du ridicule, de "brolove" avec Donald Trump, il s'est efforcé de démontrer qu'il maîtrisait le cours des événements, qu'il n'était pas à la remorque des États-Unis, que la sécurité de la France était sa priorité et le multilatéralisme toujours sa boussole internationale.
De fait, la plus grande partie de son interview est constituée par la narration de ses relations avec les grands dirigeants du monde, Trump, Poutine, voire Netanyahu, comme si le multilatéralisme consistait seulement à "parler en même temps avec tout le monde". Le Président Macron détaille, non sans une certaine ingénuité, les brillantes combinaisons stratégiques qu'il élabore avec chacun d'eux : ""remaçonner" la stratégie avec Donald Trump en se focalisant sur le politico-militaire et la lutte contre le terrorisme" car "Donald Trump, je le connais bien maintenant". Quant à Poutine, "Je lui dis donc que je sais, qu’il sait que je sais, qu’il n’y a pas de doutes sur l’issue et que je fais ce que le devoir m’impose". Les décisions de Donald Trump de "soulever le couvercle de la boite de Pandore iranienne" (voir mon article du 24 avril  dernier) malgré les recommandations d'Emmanuel Macron, son attitude insultante envers les victimes française du Bataclan, montrent le dédain du président US envers le partenaire français.
Sur la nécessité du multilatéralisme, Emmanuel Macron semble avoir oublié ce qu'il déclarait en septembre dernier à la tribune des Nations unies : « le multilatéralisme, c'est la règle du droit, c'est l'égalité entre les peuples, c'est l'égalité de chacune et de chacun d'entre nous, c'est ce qui permet de construire la paix et relever chacun de nos défis ». C'est une définition qui dépasse largement le tête-à-tête entre "Grands", cette vieille conception des relations internationales. Bien qu'il fasse une courte référence au Général de Gaulle au début de son interview, le Président Macron oublie justement cette originalité de la politique de De Gaulle : celle d'être capable de s'appuyer sur l'ensemble des peuples, notamment sur les pays non-alignés, pour desserrer l'étau du tête-à-tête entre puissances, comme il le fit lors de son discours de Pnom-Penh en 1966. C'est cette vision qui avait conduit Jacques Chirac et Dominique de Villepin à s'appuyer sur l'ensemble des nations et sur les opinions publiques en 2003, pour s'opposer aux décisions guerrières de George W. Bush en Irak.
Ce glissement progressif d'Emmanuel Macron vers une surévaluation de ses capacités personnelles, dans le seul relationnel direct avec les Grands, décrédibilise les "quatre priorités" qu'il énonce dans le JDD : "la sécurité, ensuite les valeurs, puis les biens communs à commencer par le climat et enfin la stabilité économique pour favoriser nos intérêts commerciaux". Le renforcement de la construction européenne n'y suffira pas à elle seule,comme il le propose.
Concernant la lutte pour les biens communs dont le climat, la Conférence de Paris, COP21, a montré la nécessité de s'appuyer sur la force des opinions publiques, pour surmonter les réticences et les égoïsmes des grandes puissances.
La recherche de la sécurité pose aujourd'hui, plus que jamais, la nécessité de la relance des efforts diplomatiques pour des objectifs de court terme. Il s'agit de reprendre, avec modestie et persévérance, les discussions avec les trois autres membres permanents du Conseil de sécurité, les Européens, les non-alignés, pour isoler Trump et ses soutiens, Netanyahu et les Saoudiens, afin de maintenir l'accord sur le nucléaire iranien, et de contrer les sanctions économiques futures des États-Unis.
Il faut retravailler sans a priori politique avec tous les acteurs régionaux intéressés, dont la Russie et l'Iran, avec au moins une partie de l'équipe gouvernementale syrienne actuelle, pour aboutir rapidement à une solution politique en Syrie, permettant de diminuer les tensions régionales, même si la France sera handicapée par la faute politique des bombardements illégaux d'avril.
À moyen terme, se pose la question de remettre au premier plan de l'agenda, en lien avec les Nations unies et son Secrétaire général, les différentes négociations pour la démilitarisation des relations internationales. Les chiffres des dépenses militaires publiés, il y a quelques jours, par l'institut suédois du SIPRI (1739 Mds de $ en 2017, avec la montée de l'Arabie saoudite et de l'Inde) sont très inquiétants.
Les dernières discussions à Genève dans le cadre du Traité de non-prolifération nucléaire ont montré l'importance d'aboutir, au plus vite, à la tenue d'une Conférence sur la création d'une zone sans armes de destruction massive (ni nucléaires, ni chimiques, ni biologiques) au Moyen-Orient. Ces discussions ont montré également que les pays nucléaires devaient regarder d'un oeil différent et avec plus d'ouverture, le processus de ratification du Traité d'interdiction des armes nucléaires, faute de voir se creuser un fossé préjudiciable dans la communauté internationale.
Il s'agit là, tant dans le court terme que le moyen terme, d'objectifs sérieux, réalisables au prix d'efforts politiques intenses, loin des paillettes de la communication facile, des combinaisons intellectuelles présomptueuses dont les échecs répétés décrédibiliseraient la diplomatie française.

dimanche 15 avril 2018

Intervention en Syrie : interrogations troublantes

"J’ai donc ordonné aux forces armées françaises d’intervenir cette nuit, dans le cadre d’une opération internationale menée en coalition avec les Etats-Unis d’Amérique et le Royaume-Uni et dirigée contre l’arsenal chimique clandestin du régime syrien" (communiqué de l'Élysée du 14 avril).
Ainsi, quinze ans après la position courageuse de la France refusant une action guerrière en Irak avec les États-Unis et le Royaume-Uni sans mandat des Nations unies, le président Macron vient de recréer une alliance "occidentale" pour mener une opération militaire internationale unilatérale.
Cette opération est clairement illégale selon la Charte des Nations unies qui rappelle que, seul le Conseil de sécurité, peut décider d'actions militaires et non des pays qui s’érigeraient en défenseurs du droit international. De la même manière, contrairement à ce qu'affirme le ministre des Affaires étrangères, la résolution 2118 du Conseil de sécurité ayant pour objet l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, adoptée à l'unanimité le 27 septembre 2013, précise que c’est aussi le Conseil de sécurité qui prend la décision d’intervenir militairement et non tel ou tel État.
Le bombardement de sites syriens supposés receler des installations ou des stocks d'armes chimiques a eu lieu le jour où des inspecteurs de l'OIAC arrivaient sur place pour mener une enquête pour avoir la preuve des agissements criminels de Damas la semaine précédente le 7 avril, à Douma.
Les dirigeants français civils et militaires ont déclaré que les objectifs de ces attaques militaires étaient clairement identifiés comme liés à la production d'armes chimiques, activité qui serait complètement illégale depuis que la Syrie, en 2013, avait été contrainte d'adhérer à la Convention internationale d'interdiction des armes chimiques, sous la pression politique conjointe de Barak Obama et Vladimir Poutine. Cet accord avait permis de détruire une partie considérable des stocks chimiques syriens.
Une question se pose : si les occidentaux avaient des preuves de la poursuite de programmes clandestins de la fabrication ou du stockage de telles armes, pourquoi n'ont-ils pas déployé des initiatives politiques fortes, en concertation ou en faisant pression sur les Russes, pour poursuivre la destruction et la mise sous surveillance de ces stocks, pour empêcher le régime de Bachar Al Assad de mener des bombardements criminels ?
On cherche en vain, depuis cinq ans, la trace de telles initiatives au Conseil de sécurité, en dehors de quelques déclarations formelles sans véritable campagne.
Ce dimanche 15 avril, la France a annoncé, par contre, qu'elle va déposer une résolution au Conseil de sécurité pour renforcer les inspections et la surveillance du processus de destruction des stocks chimiques syriens, ainsi que des propositions pour trouver une issue politique au conflit !
Cela amène à une terrible interrogation : pourquoi cette inertie politique pendant des semaines avant le bombardement du 7 avril ? Pourquoi des initiatives politiques maintenant après l'envoi de missiles illégalement ? A-t-on attendu que le régime de Damas franchisse la fameuse "ligne rouge" pour pouvoir ensuite accomplir une action militaire spectaculaire, sans doute peu efficace, mais permettant aux occidentaux comme certains observateurs l'ont fait remarquer, de revenir au premier plan de la scène politique du conflit syrien ?
Aurait-on délibérément pris le risque de voir périr des dizaines d'innocents pour faire un "coup" politique au lieu de tout faire pour prévenir des attaques criminelles de l'armée syrienne ? Je me refuse à croire à une telle hypothèse, mais je pense que, dans les cercles militaires français, étatsuniens, de l'OTAN, la culture dominante reste celle du primat de la force sur le respect du droit international et l'action politique.
Pourtant, depuis 2001, les solutions de force ont toutes été des échecs, de l'Afghanistan, à l'Irak, la Libye ou la Syrie. Seules les initiatives politiques d'Obama pour trouver une solution politique à la crise avec le programme atomique de l'Iran ont été une réussite.
La position militariste se trouve confortée par l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, cet irresponsable, dont le lanceur d'alerte Daniel Ellsberg, a appelé Jim Mattis, le chef du Pentagone, à protéger le monde des "tentations" de déclencher une guerre et à être prêt à s'opposer à d'éventuels ordres « impulsifs et irréfléchis ».
Il y a vraiment besoin que se développe un large mouvement d'opinion pour dire : faisons appliquer le droit international partout, pour empêcher les tyrans comme Assad de nuire, pour permettre à tous les peuples comme les peuples palestiniens et israélien de vivre en paix et dans la liberté, pour rejeter les vieilles  politiques de force des États en renforçant plus que jamais les institutions multilatérales comme les Nations unies permettant à tous les peuples de régler leurs différends en commun.

lundi 24 novembre 2014

L'AGENDA DE LA QUINZAINE (17-30/11/2014)

LES ÉVÉNEMENTS DE LA SEMAINE ÉCOULÉE...

Jeudi 20 novembre 2014
Lors du colloque pour les 50 ans de la dissuasion, qui s'est tenu à l'École militaire, le ministre de la Défense, M. Jean-Yves Le Drian, s'est fait de manière outrancière le chantre de la force nucléaire française.
Il n'a pas hésité à dénaturer le débat sur l'élimination des armes nucléaires en déclarant notamment que "ceux qui entendent délégitimer fondamentalement la dissuasion nucléaire se trompent de combat. Nous devons éviter que l’appel généreux à un monde « sans armes nucléaires » ne prépare un monde où seuls les dictateurs en disposeraient".
Dire cela est émettre plusieurs contre-vérités. L'appel à un "monde sans armes nucléaires" n'est pas seulement "généreux" mais surtout réaliste, en fonction de l'évolution du monde d'aujourd'hui. La prolifération de l'avis de nombreux experts risque d'être incontrôlable (notamment avec l'apparition de groupes terroristes sans scrupules) sans un processus d'interdiction radicale, comme cela a été le cas, avec succès, pour les armes chimiques. L'évolution des moyens de contrôle, de vérification des recherches nucléaires est telle qu'aucun "dictateur" ne pourrait essayer d'acquérir l'arme nucléaire sans réaction de la communauté internationale.
M. Le Drian s'est hasardé sur le terrain diplomatique en affirmant que "La France est à l’avant-garde d’une politique résolue de maîtrise des armements et de lutte contre la prolifération, dans le cadre du droit international. C’est sur ce terrain-là qu’elle entend concrètement progresser pour éviter que de nouvelles courses aux armements ne s’enclenchent". C'est une autre contre-vérité : les seules mesures de limitation des armements prises par la France l'ont été en 1996 dans la foulée du "coup de poker" pris par jacques Chirac de fermer le site d'essais nucléaires du Pacifique ainsi que le plateau d'Albion. Depuis, le renouvellement à marche forcée des missiles et sous-marins nucléaires français, la simulation d'essais nucléaires en laboratoire sur le site du laser Mégajoule, au Barp, ont été largement considérés comme autant de signes d'un refus français d'observer l'article VI du Traité de non-prolifération nucléaire, obligeant les puissances nucléaires à aller vers le désarmement nucléaire. 
Enfin, le ministre de la Défense s'est lancé dans une laborieuse justification de la "deuxième composante", les armes nucléaires embarqués sur les avions Mirage et Rafale.
Pour lui, "La composante aéroportée, sous l’égide des Forces aériennes stratégiques, ou embarquée au sein de la Force aéronavale nucléaire quand elle est activée, offre à l’autorité politique un large choix d’options stratégiques et militaires, avec un éventail de modes d’action qui confère une véritable souplesse à l’ensemble du dispositif. Notamment, elle contribue fortement, sur décision du Président de la République, à l’exercice d’effets stratégiques ciblés, ou à une frappe d’avertissement ultime. La composante aéroportée représente aussi une capacité « visible », qui ouvre, en cas de nécessité, un espace pour une manœuvre politico- diplomatique".
La notion "d'avertissement ultime" reste une notion incompréhensible d'une point de vue stratégique et qui mine même, la notion de dissuasion, défendue par ses défenseurs.
"Avertissement ultime" suppose que la suite est l'emploi élargi de missiles nucléaires tirés depuis les sous-marins et synonymes de conflit nucléaire mondial. Une telle option suppose que la France est menacée dans son existence même, et ce par une puissance capable de la faire, c'est-à-dire une puissance nucléaire, et le stade de "l'avertissement ultime" a alors quelque chose de ridicule, relevant plus de la gesticulation politique.. Sinon, pour quel "intérêt vital", un pays prendra-t-il le risque de déclencher une guerre nucléaire, conséquence inévitable d'une frappe même venant d'un "plus petit" missile aéroporté ? Pour riposter au risque d'un blocage d'un détroit maritime ? au risque de blocage de ses moyens de télécommunications et internet ?
Ce n'est pas un hasard si l'éventail de plus en plus large de spécialistes critique l'existence de cette "deuxième composante nucléaire" depuis les anciens ministres Paul Quilès et Hervé Morin, ou le général Norlain..

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CEUX DE LA SEMAINE À VENIR...

Samedi  29 novembre :
12e Forum « La non-violence à l’école » : la Coordination pour l’éducation à la non-violence et à la paix organise chaque année son Forum annuel « La non-violence à l’école ». Cette année, le 12e Forum de la Coordination aura pour thème : « JE DECLARE LA PAIX : POURQUOI, COMMENT ? ». Il aura lieu le samedi  29 novembre 2014, de 10h à 17h, à la Mairie du Xème arrondissement de Paris (72 rue du Faubourg Saint-Martin – 75010 Paris - M° Château d’Eau). Renseignements : http://education-nvp.org/12e-forum-la-non-violence-a-lecole/

Samedi 29 novembre :
La Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien est célébrée tous les ans par l’Organisation des Nations unies le 29 novembre. Cette date a été retenue en raison de sa signification particulière pour le peuple palestinien. Ce jour-là en effet, l’Assemblée générale a adopté, en 1947, la résolution 181 (II), connue par la suite sous le nom de résolution sur le plan de partage, qui prévoyait la création en Palestine d’un « État juif » et d’un « État arabe », Jérusalem étant placée sous un régime international spécial

Vendredi 28 novembre et mardi 2 décembre :

Le Par­lement français se pro­noncera le 2 décembre sur la recon­nais­sance d’un État pales­tinien, avec Jérusalem-​​Est pour capitale, en votant pour ou contre une pro­po­sition de réso­lution des députés du Parti socia­liste à l’Assemblée.
La pro­po­sition "invite le gou­ver­nement français à recon­naître l’état de Palestine en vue d’obtenir un règlement défi­nitif du conflit". Le texte sera débattu le 28 novembre par les députés en com­mission, mais le vote n’interviendra que le 2 décembre. Il "affirme l’urgente nécessité d’aboutir à un règlement défi­nitif du conflit per­mettant l’établissement d’un État démo­cra­tique et sou­verain de Palestine, vivant en paix et en sécurité avec Israël, sur la base des lignes de 1967, avec Jéru­salem pour capitale de ces deux États, et fondé sur une recon­nais­sance mutuelle". Il juge "que la solution des deux États, promue avec constance par la France et l’Union euro­péenne, suppose la recon­nais­sance de l’État de Palestine aux côtés de celui d’Israël".
Rappelons que la Suède a récemment reconnu l'État de Palestine, qui a le statut d'observateur à l'ONU depuis 2012, et les Parlements britanniques et espagnols ont appelé leurs gouvernements à le reconnaître également. Au total, 135 pays dans le monde ont reconnu la Palestine, selon l'Autorité palestinienne.

vendredi 24 octobre 2014

Quel bilan d'étape du désarmement mondial ? Les armes chimiques et biologiques.

Il peut être opportun de se saisir de cette semaine du 20 au 26 octobre 2014 qui est officiellement la "semaine du désarmement" pour les Nations unies et ce, depuis 1978, pour faire le point des efforts internationaux pour le désarmement. Il s'agit des décisons internationales prises, soit pour réglementer et contrôler les différents types d'armes (en évitant leur "prolifération"), soit pour diminuer leur quantité, voire en supprimer certaines catégories. C'est ce qui distingue la maîtrise ou contrôle des armements ("arms control") du désarmement proprement dit. Une distinction est généralement faite ensuite entre les armes de destruction massive et les armes classiques.
Nous nous intéresserons dans une première série d'articles aux armes de destruction massive ou ADM parmi lesquelles on décompte les armes nucléaires, les armes chimiques et les armes biologiques.
Examinons d'abord la question des armes chimiques. Dans les années 1980, l'emploi d'armes chimiques par l'Irak contre l'Iran relança les discussions internationales sur le désarmement chimique. En 1984, un accord fut trouvé sur la structure d'un traité préliminaire. Des pourparlers bilatéraux entre l'Union soviétique et les États-Unis firent progresser la question. En 1993, la Convention sur les armes chimiques fut signée à Paris. Elle interdit d'acquérir, de mettre au point, de fabriquer, de stocker, de transférer et d'employer des armes chimiques. Elle est entrée en vigueur le 29 avril 1997. Ce traité repose sur trois volets : l'interdiction complète des armes chimiques, la destruction des arsenaux existants, un régime de vérification des engagements pris dans le cadre de la Convention et placé sous l'égide d'une institution indépendante, l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).

La Convention est unique en son genre, car il s'agit du premier traité multilatéral qui interdit toute une catégorie d'armes de destruction massive, du premier traité de désarmement négocié dans un cadre entièrement multilatéral à Genève, ce qui a facilité son élargissement à un maximum d'États. Enfin, cette Convention a également été négociée avec la participation active de l'industrie chimique du monde entier.

Le système de vérification est rigoureux : il exige des déclarations nationales de données relatives à la production chimique industrielle, des inspections continuelles et de routine des installations concernées par le traité, des inspections par mise en demeure, avec un préavis très court, de toute installation sur le territoire d'un État-partie, pour résoudre les préoccupations relatives au respect de la Convention.
Il y a un an, le 1er septembre 2013, 189 États parties avaient ratifié la Convention. Deux États l'avaient signée mais pas ratifiée : Israël et Birmanie ; cinq États demeuraient en dehors de la convention : Angola, Corée du Nord, Égypte, Soudan du Sud, Syrie.
Après que Damas ait été accusé d’avoir utilisé du gaz sarin dans une attaque ayant fait 1 400 morts l’été 2013, un accord russo-américain a obligé celle-ci à adhérer à la CIAC pour éviter une intervention militaire américaine. La Syrie est ainsi devenue le 14 octobre 2013 le 190e membre de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (L’OIAC, chargée de superviser le démantèlement de l'arsenal chimique syrien, s’est vu décerner le prix Nobel 2013 de la paix).
Le 28 août 2014, l'OIAC a annoncé la destruction de 93% des arsenaux chimiques évacués de Syrie qui représentaient un total de 1 300 tonnes d’agents chimiques. Les produits chimiques les plus dangereux avaient été emmenés sur le navire américain "Cape Ray". Leur destruction par hydrolyse avait commencé début juillet.

L'adhésion de la Syrie, même contrainte et forcée, à la Convention d'interdiction, est un événement qui a été largement sous-estimé dans les médias, au profit d'autres considérations politiques, géo-stratégiques. Or, cette adhésion ouvre la voie à d'autres avancées pour la démilitarisation dans cette région : l'Égypte et Israël ont perdu leur principal argument pour ne pas ratifier à leur tour cette Convention d'interdiction des armes chimiques '(l'un, l'Égypte, qui se voulait solidaire de la position syrienne, l'autre, Israël, qui se disait menacée par les armes chimiques syriennes). Obtenir la ratification de la CIAC par ces deux États serait un pas considérable pour ouvrir la voie à un accord plus large de création d'une zone sans armes de destruction massive (donc, y compris sans armes nucléaires) au Moyen-Orient, projet qui stagne malgré les espoirs de 2013 sur la tenue d'une Conférence internationale à Helsinki sur ce projet..
Le bilan de cette Convention pour l'interdiction des armes chimiques est en voie d'être exemplaire. Un an après l'affaire syrienne, au 31/08/2014, 61 608 (soit 84,95 pour cent) des 72 524 tonnes des stocks mondiaux déclarés d'agents chimiques ont été détruits sous vérification. D'avril 1997 au 30/06/2014, l'OIAC a effectué 5 545 inspections sur le territoire de 86 États parties, y compris 2 728 inspections de sites industriels. 2 024 sites industriels ont été inspectés sur un total de 5 384 sites déclarés.
Les stocks restant à détruire sont situés essentiellement en Russie et aux États-Unis. Ces deux pays, qui avaient amassé pendant la guerre froide, d’énormes stocks d’armes chimiques, s’étaient engagés à les détruire avant avril 2012 mais les deux pays ont ensuite annoncé ne pas être en mesure de respecter ce calendrier. Les États-Unis, qui ont détruit pour l’heure environ 90 % de leur stock, ont fixé l’échéance de 2023. Pour sa part, la Russie, qui a déclaré en 2013, avoir détruit plus de 29 000 tonnes, (soit 73 % d'un stock de 39 966,586 tonnes) s’est engagée à détruire son stock d’armes chimiques d’ici à décembre 2015. Il n'est pas encore certain que ce délai pourra être tenu compte tenu du coût élevé de ces destructions et bien que d'autres pays, comme l'Union européenne, participent au financement de ces efforts.
Il n'empêche que le désarmement des armes chimiques, malgré ses aléas, peut être considéré comme un modèle pour l'élimination des autres armes de destruction massive en terme de traité, de dispositif de suivi et de contrôle de l'élimination et d'une possibilité de recherche, enfin, de coopération avec l'industrie du secteur concerné.
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Les armes biologiques : elles sont considérées également comme des armes de destruction massive. Elles utilisent délibérément des agents pathogènes pour tuer ou blesser des êtres humains ou des animaux.
Elles sont nettement plus faciles à fabriquer que les armes chimiques ou nucléaires et coûtent beaucoup moins cher.
Par exemple, avant la guerre du Golfe de 1991, l'Irak avait fait, en très peu de temps, des progrès considérables dans la mise au point d'une capacité d'armement biologique, et la secte japonaise Aum Shinrikyo, connue pour son attaque chimique dans le métro de Tokyo en 1995, avait réussi à fabriquer de l'anthrax, mais pas à mettre au point un moyen de diffusion.
Même si elles présentent "des avantages", les armes biologiques sont généralement considérées comme peu fiables et pas très utiles, et donc militairement inférieures aux armes chimiques et nucléaires. Leur utilisation est interdite par une convention internationale depuis 1925. En 1972, leur mise au point et leur possession ont été interdites par la "Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage des armes bactériologiques ou à toxines et sur leur destruction" (CIABT) qui est entrée en vigueur le 26 mars 1975. 165 États l'ont ratifiée aujourd'hui et se sont engagés à ne pas développer, produire, stocker ou utiliser des armes biologiques.
Cependant, l'efficacité de la Convention reste limitée étant donné qu'elle ne prévoit aucun régime de vérification du respect de ses dispositions. Le respect de l’interdiction demeure subordonné à la bonne foi des États-parties, puisque aucun contrôle international ne s’exerce sur leurs activités biologiques.
La Convention prévoyait des Conférences d'examen tous les cinq ans. À la suite de l’échec, en 2001, de la tentative d'ajouter un Protocole visant à introduire un dispositif de contrôle dans la Convention du fait de l'opposition de l'administration Bush, un cycle intersessions, prévoyant chaque année une conférence des États-parties et une réunion d’experts, a été mis en place. Ces réunions annuelles ont pour but de dégager des vues communes sur les moyens susceptibles d’améliorer la mise en oeuvre de la Convention. Néanmoins, seules les Conférences d’examen quinquennales continuent d'avoir un pouvoir de décision.
La dernière Conférence d’examen, en décembre 2011, a déterminé trois sujets qui seront à l’ordre du jour des réunions du cycle actuel d’intersessions (2012-2016) : la coopération et l’assistance, avec une attention particulière portée à l’article X ; l’examen des développements dans le domaine de la science et de la technologie ; le renforcement de la mise en œuvre nationale. Par ailleurs, deux thèmes feront l’objet d’un examen bi-annuel spécifique : les mesures de confiance (2012-2013) et le renforcement de la mise en œuvre de l’article VII portant sur les mesures d’assistance aux États susceptibles d’être victimes d’une attaque biologique (2014-2015).
Après avoir tardé à signer la convention (elle ne l'a fait qu'en 1984 sous la pression de l'opinion), la France a pris plusieurs initiatives entre les sessions depuis 2001 pour contribuer au renforcement de la coopération contre la prolifération biologique.
Comme puissance nucléaire, elle a toujours craint que l'extension de ce type d'arme ne brouille le jeu classique de la dissuasion, même si une des particularités des armes biologiques est qu'elles ne confèrent pas, à l'inverse des armes nucléaires, les attributs de la puissance.
De plus, la problématique des armes biologiques ne se réduit pas à sa dimension militaire mais elle touche les questions de développement des pays au travers des politiques de santé publique et de maîtrise des épidémies, les questions de démocratie au travers de la transparence et du contrôle possible des recherches, les intérêts éventuels des groupes pharmaceutiques ou laboratoires de recherches, voire la sensibilisation des scientifiques. Toutes problématiques importantes pour un pays comme la France qui possède une forte industrie pharmaceutique et des laboratoire classés "sensibles" en région Rhône-Alpes.
Malgré ses insuffisances et sa fragilité, le processus de "petits pas" actuel progresse et certains experts estiment que cette Convention semble « condamnée à réussir » pour donner tort à ceux qui estiment que « les armes biologiques pourraient bien jouer au XXIe siècle le rôle des armes  nucléaires au XXe siècle". La crainte de l'apparition d'un "bioterrorisme" n'est-elle pas de plus en plus présente dans les réflexions ? 
Dans un prochain article, nous ferons le point sur les armes nucléaires et le désarmement.

vendredi 19 avril 2013

Armes nucléaires : les bonnes questions...

Prolifération et désarmement nucléaires seront, comme chaque année, à l'ordre du jour des discussions, qui s'ouvriront,  ce lundi 22 avril à Genève, dans la préparation de la Conférence d'examen du TNP (Traité de non-prolifération nucléaire) en 2015. Cette réunion devait initialement être un simple point d'étape dans le suivi du plan d'action, modeste mais réel, décidé en 2010 par la Conférence de New-York. Ce bilan aurait été considéré comme décevant par la majorité des pays non-nucléaires et par les ONG : aucun progrès significatif dans la réduction du nombre de têtes nucléaires dans le monde, poursuite de la modernisation des armes et aucune évolution dans la prééminence des doctrines militaires basées sur la fameuse et contestée notion de "dissuasion" nucléaire. Mais cette réunion qui s'annonçait tristement routinière, risque d'être bouleversée par trois événements majeurs, un positif et deux négatifs selon moi, qui se sont produits dans ces six derniers mois.
Commençons par la Conférence qui s'est tenue à Oslo, le 6 mars 2013, sur les "conséquences humanitaires de l'emploi des armes nucléaires". Pour la première fois depuis 1945, une Conférence internationale au plus haut niveau a réuni 127 représentants de gouvernements, d'institutions internationales dont la Croix Rouge Internationale qui ont décidé de donner un nouvel élan pour écarter la menace nucléaire de l'humanité. Ils ont suivi en cela l'opinion de la Croix-Rouge qui a rappelé que tant au niveau international que national, aucun moyen n'existe pour répondre effectivement aux conséquences d'une explosion nucléaire, même limitée.
La Déclaration finale de la Conférence, prise à l'initiative de ICAN (Campagne internationale pour le désarmement nucléaire) note qu'en cas d'explosion nucléaire, "Les conséquences seraient mondiales, de long terme et complètement catastrophiques pour le santé humaine, notre environnement, notre développement, la sécurité, les droits humains et les ressources alimentaires (...)". Les Cinq puissances nucléaires ont finalement décidé de boycotter cette Conférence en estimant qu'elle risquait de créer une "diversion" du processus "pas-à-pas" existant avec le TNP et la Conférence du désarmement. Cette position n'a pas été suivie par plusieurs pays de l'OTAN, et d'autres grands pays comme le Japon, la Corée du Sud ou l'Australie, tous pays "bénéficiant" pourtant du parapluie nucléaire étatsunien. Le surplace marqué par le processus des Conférences d'examen du TNP, et l'absence de travail depuis 16 ans à la Conférence du désarmement, laisse sceptique sur ce "risque de diversion" !
On peut espérer que, lors de la réunion de Genève sur le TNP, les représentants des puissances nucléaires seront sévèrement questionnés sur leur absence à Oslo...
Deux événements risquent de peser négativement sur le déroulement de la réunion genevoise : le premier est le report annoncé le 23 novembre 2012, par les USA de  la Conférence sur la création au Moyen-Orient d'une Zone libre d'armes de destruction massive qui devait se tenir le 18 décembre à Helsinki.
Cette Conférence, initialement décidée en 1995 lors de la réunion qui décida de proroger indéfiniment le TNP, avait permis d'obtenir le soutien à la prorogation de nombreuses délégations arabes. En 2010, après de multiples discussions, la décision avait été prise d'aboutir enfin concrètement à une telle Conférence : la perspective d'un Moyen-Orient sans armes de destruction massive semble pour beaucoup d'observateurs la seule manière de supprimer la menace représentée par le stocks d'armes nucléaires illégales détenues par Israël, de lever tout ambiguïté sur un éventuel programme de construction d'armes nucléaires par l'Iran, sans compter que cela permettrait sans doute d'obtenir la ratification de la Convention d'interdiction des armes chimiques par la Syrie et l'Égypte. Les prétextes avancés par les États-Unis, sous la pression du gouvernement israélien, estimant que les "conditions de sécurité" n'étaient pas réunies, ne sont pas convaincants. De ce fait, les pays arabes risquent de montrer fortement leur mécontentement lors des discussions de Genève : de nouveaux risques de blocage sont ainsi créés.
Le deuxième événement survenu est bien sûr la suite des provocations et des gesticulations militaires nucléaires de la Corée du Nord : la situation est évidemment préoccupantes, des initiatives politiques doivent être prises notamment avec l'aide des puissances régionales comme la Chine. Il serait malgré tout contre-productif que ces événements servent de prétexte aux puissances nucléaires pour faire porter l'essentiel des débats de Genève sur les menaces sur la prolifération dues à la situation coréenne, voire en y ajoutant les interrogations sur l'Iran, et ainsi, d'éviter d'avoir à répondre sur leur inactivité, voire leur obstruction sur les questions de désarmement nucléaire complet, abordées notamment à Oslo. À suivre...

lundi 3 décembre 2012

État de Palestine : une nouvelle étape vers la paix ?

La Palestine vient de passer, grâce au vote de l'Assemblée générale, du statut "d'entité-observateur permanent" à celui d'État, au statut d'observateur non-membre auprès des Nations unies, tout comme l'est le Saint-Siège (l'État du Vatican). La nouveauté juridique est l'apparition du terme "d'État" qui renforce à l'évidence la crédibilité diplomatique du gouvernement palestinien de Mahmoud Abbas, ce qui devrait encourager d'autres États, au delà des 132 actuels qui ont reconnu bilatéralement la Palestine comme État, à le faire (la France ne l'a pas encore fait). Il sera plus difficile d'émettre de nouveaux vetos au Conseil de Sécurité pour empêcher qu'il ne propose, comme le veut la Charte, à l'Assemblée générale des Nations unies, de reconnaître la Palestine cette fois comme État de plein exercice.
Dès maintenant, ce statut d'État observateur non-membre va permettre à la Palestine d'adhérer à de nouvelles organisations et Traités internationaux, régis par des Conventions comme la Cour pénale internationale. Cela pose en terme nouveau la relation avec Israël qui va devenir officiellement "puissance occupante" d'un État reconnu de facto comme tel à l'ONU. De même, des actions militaires sans retenue, comme l'attaque de Gaza en 2009, pourront être dénoncées par le gouvernement palestinien comme crimes de guerre,voire contre l'humanité. Le vote positif de l'Assemblée générale  est aussi un moyen de soutenir le président Abbas qui en a besoin sur le plan intérieur : le Hamas à Gaza n'a en effet soutenu que la dernière semaine sa démarche à l'ONU pour la reconnaissance de la Palestine comme État non-membre.
La France a voté "Oui"pour ce statut de la Palestine, ce qui est positif. Le nouveau Président F. Hollande avait fait un geste remarqué en recevant à l'Elysée dès le 8 juin, le président Abbas, alors qu'il n'a reçu Nettayahu qu'en novembre dernier.
En même temps, il est clair que ce succès diplomatique palestinien n'est qu'une étape, sur le chemin de la reprise des négociations, de la création des conditions durables d'un climat d'arrêt des violences contre les civils et de construction d'une paix durable entre les deux États.
Le cessez-le-feu actuel, encore combien fragile, a été obtenu grâce aux efforts de l'Égypte, du secrétaire de l'ONU Ban Ki-moon, et à la pression des USA. La position claire du président Abbas appelant à cesser les violences, y compris les tirs de roquettes, a aidé. On a retrouvé la même lucidité du côté de l'ambassadeur délégué de la Palestine auprès de l'Unesco, Elias Sembar, qui déclarait la semaine dernière sur Europe 1 : "nous nous attendions à ce qu'il y ait des manoeuvres de diversion, hélas tragiques, par plusieurs parties opposées à notre entrée dans l'ONU. (...) Cette diversion est tragique et criminelle car il y a des civils qui sont en train de payer ce jeu avec la mort".
Il est dommage qu'on ne trouve pas cette même netteté en France dans les divers collectifs et mouvement se réclamant de la paix au Proche-Orient, qui hésitent à dire "ni roquettes, ni bombardements et colonisation".
Il ne s'agit pas d'établir une fausse symétrie entre la puissance israélienne et les faibles moyens des groupes palestiniens mais de l'affirmation du refus de la prise en otages des civils tant israéliens que palestiniens, de l'affirmation d'une coexistence nécessaire demain entre les deux peuples.
Il est positif que le principal mouvement pour la paix en Israël, "la Paix maintenant", se soit félicité du vote de l'ONU  et le considère "comme un premier pas vers la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël et vers une solution négociée à deux États, que nous appelons l’un et l’autre de nos vœux".
Il faut en effet redoubler d'efforts pour promouvoir une solution "2 États, 2 capitales à Jérusalem" et dénoncer tous les obstacles à cette perspective comme l'annonce par Israël de nouvelles colonisations en Cisjordanie. Le soutien au gouvernement palestinien est crucial, tant sur le plan politique que financier : l'Union européenne vient de ré-augmenter sa contribution à l'agence onusienne pour les réfugiés qui travaille surtout à Gaza (avec 80 millions d'euros, l'UE est le principal bailleur de fonds de l'UNRWA) mais il faut exiger qu'Israël ne bloque pas les sommes qui sont légitimement dues aux Palestiniens pour leurs produits exportés. La Palestine a marqué des points dans une démarche "ouverte" moins dirigée contre son voisin qu'en direction de la communauté internationale ; espérons que les dirigeants palestiniens sauront continuer dans cette voie.
La construction de la paix nécessaire au Proche-Orient est trop complexe pour l'enfermer dans des formules rigides ou incantatoires.
Dans cet esprit, l'annonce du report de la Conférence qui devait à Helsinki, en fin d'année, essayer de faire progresser les discussions sur une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen-Orient est une mauvaise nouvelle pour la paix.
Le principe de cette conférence avait été confirmé en mai 2010 lors de la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération nucléaire. Les USA avaient accepté d'en être les co-parrains mais Israël, seul pays nucléaire de la région, a toujours proclamé sa réticence. La tension à Gaza, la crise syrienne, le débat autour des projets de recherche nucléaire de l'Iran ont justifié en septembre dernier son annonce de ne pas participer à cette conférence. Le secrétaire de l'ONU, Ban Ki-moon, la France ont annoncé qu'ils souhaitaient que les discussions et consultations continuent, "dans les délais les plus brefs, en vue de garantir que la conférence se tienne le plus tôt possible en 2013".
C'est un objectif essentiel : il n'y aura pas d'évolutions positives durables dans les différents problèmes de la région sans un environnement géographique moins militarisé. Cela passe par la clarification, la réintégration dans les discussions, et la disparition des armes nucléaires israéliennes, la transparence complète pour écarter toute composante militaire des recherches nucléaires iraniennes, la signature par la Syrie de la Convention d'interdiction des armes chimiques et la destruction de ses stocks, notamment.
   

jeudi 10 novembre 2011

Nouvelles en vrac...

(Dans les dépêches)
Des armes nucléaires pakistanaises dans des camionnettes de livraison ?
Le ministère pakistanais des Affaires étrangères a rejeté dimanche dernier les affirmations de magazines américains selon lesquelles le Pakistan avait déplacé ses armes nucléaires à bord de camionnettes dans des conditions dangereuses, les qualifiant de «pure fiction».
Deux magazines américains, l'Atlantic et le National Journal, ont affirmé vendredi que le Pakistan avait déplacé ses armes nucléaires à bord de camionnettes afin de les dissimuler aux agences de renseignement américaines, accroissant le risque qu'elles soient subtilisées par des militants islamistes.
Mais au lieu de les transporter dans des véhicules blindés au sein de convois protégés, les armes nucléaires «capables de détruire des villes entières sont transportées dans des camionnettes de livraison sur les routes embouteillées et dangereuses du pays», ont affirmé les deux magazines.
Des stocks d'armes chimiques en Libye ?
Les autorités libyennes ont découvert sur deux sites militaires des armes chimiques qui, selon un expert, étaient prêtes à être assemblées et utilisées, ainsi qu'un autre site abritant 7.000 barils d'uranium brut. Des spécialistes en armes chimiques sont arrivés en Libye cette semaine pour commencer à protéger ces sites, selon un responsable de l'ONU.
D'autre part, au mois d'octobre, une équipe de Human Rights Watch a découvert sur un site, dans le désert libyen, des armes qui n'étaient pas gardées, avec des milliers de caisses de munitions.
Les autorités craignent que ces matériaux tombent entre de mauvaises mains, notamment des missiles sol-air qui pourraient constituer une menace pour l'aviation civile. Le Conseil de sécurité de l'ONU a exhorté les autorités libyennes à agir rapidement, disant craindre que les armes tombent entre les mains de terroristes. Les États-Unis ont déjà envoyé des experts en armement en Libye, débloquant environ 40 millions de dollars (29 millions d'euros) pour détruire les missiles sol-air, qui peuvent être utilisés pour tirer sur des avions.
Un budget se porte toujours bien en Grèce : celui des dépenses militaires !Le budget de 6 milliards d’euros de Défense de la Grèce n’a pas été touché par les mesures d'austérité imposées par l'U.E et le FMI. La république hellénique a un budget Défense qui représente 2,8% du PIB. Pour info, les Etats-Unis, en 2010 enregistraient un budget défense de 4,8% sur leur PIB total, ce qui place la Grèce en deuxième position derrière les Américains parmi les membres de l'OTAN, en pourcentage du PIB ! le budget Défense par habitant en Grèce est de 1000 dollars par habitant...
Course aux armements ou "modernisations" ?
Le groupe de recherche britannique Trident Commission, fondé par l’organisation américano-britannique BASIC (British American Security Information Council) publient des prévisions d'évolution des dépenses liées aux armes nucléaires dans les décennies à venir.
Au cours des dix prochaines années,les États-Unis et la Russie, pourraient dépenser au total pour les armes nucléaires et les secteurs qui en dépendent, 770 milliards de dollars d'après les experts.
Les Etats-Unis ont l’intention de prolonger la durée de service des missiles intercontinentaux Minuteman III et de développer un nouveau missile balistique, de construire 12 nouveaux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) SSBN(X), de prolonger la durée de service des bombardiers B-52H Stratofortress jusqu’en 2035, de concevoir un nouveau bombardier à longue portée et de commencer le remplacement des missiles de croisière à tête nucléaire existants par de nouveaux engins en 2025.
A son tour, jusqu’en 2020 la Russie dépensera au moins 70 milliards de dollars pour le développement de sa propre triade nucléaire. Ces moyens seront destinés à déployer de nouveaux systèmes mobiles RS-24 Iars (code OTAN SS-X-29), la conception pour 2018 d’un nouveau missile intercontinental avec 10 têtes nucléaires, le rééquipement des sous-marins stratégique du projet 667BDRM (code Otan Delta IV) avec des missiles modernisés Sineva et la construction de 8 SNLE du projet 955 Boreï. De plus, comme le fait remarqur BASIC, la Russie développe actuellement un SNLE de 5e génération.
Pour 2025, un nouveau bombardier stratégique à longue portée entrera en service en Russie (le PAK DA, bombardier stratégique de nouvelle génération).
Alexeï Arbatov, membre correspondant de l’Académie des sciences de Russie estime qu’en termes de nombre des ogives nucléaires la Russie et les Etats-Unis resteront en tête dans les années à venir en devançant largement tous les pays nucléaires réunis.
Selon Alexeï Arbatov, la seule réserve à cette affirmation pourrait être la possibilité théorique d’un changement de politique de la Chine et d'une accélération de la fabrication des armes nucléaires. Selon lui, la Chine est la seule puissance au monde économiquement et techniquement capable de s’approcher en 10-15 ans du niveau de la Russie et des Etats-Unis.

mardi 19 avril 2011

Désarmement : quelques nouvelles..

Le débat sur l'usage de la force en Libye et en Côte d'Ivoire a fait passer au second rang les informations relatives au désarmement. Voici quelques nouvelles de ce premier trimestre 2011 :
- Dépenses militaires : elles se sont élevées en 2010 au chiffre scandaleux de 1630 milliards de dollars US, selon l'institut SIPRI: Stockholm International Peace Research Institute.
Certes, elles n'ont augmenté "que" de 1% depuis 2009 mais ce ralentissement.. de la hausse est dérisoire par rapport à l'ampleur proclamée de la crise financière mondiale. Les dépenses militaires des États-Unis représentent 43 % des dépenses mondiales. Leur croissance a certes ralenti mais « les États-Unis ont augmenté leurs dépenses de 81 % depuis 2001 », indique le SPIRI dans un communiqué. « À 4,8 % du PIB, le fardeau militaire des États-Unis en 2010 est le plus lourd au monde après celui du Moyen-Orient », ajoute-t-il.
Les dépenses en armement du Moyen-Orient ont augmenté de 2,5 %, (111 milliards de dollars). Celles de l'Asie ont progressé de 1,4 %, celles de l'Europe ont diminué de 2,8 %, notamment avec la crise économique grecque. Par contre, il est préoccupant de constater que l'Amérique du Sud a connu la plus forte augmentation de ses dépenses militaires en 2010 avec une hausse de 5,8 % (63,3 milliards de dollars, chiffre certes moins élevé que d'autres régions du monde). En Afrique, l'augmentation la plus forte se situe chez les grands producteurs de pétrole africains, comme l'Algérie, l'Angola et le Nigéria qui ont fait grimper les dépenses en armement du continent de 5,2 %.
On peut comprendre que le Haut-représentant des Nations unies pour le désarmement, Sergio Duarte, ait indiqué mercredi dernier que l’argent dépensé par les États pour atteindre leurs objectifs tels que l’éradication de la pauvreté, l’éducation pour tous les enfants et apporter des soins sanitaires décents représentait toujours une fraction de ce qu’ils dépensent pour s’armer
«Moins du dixième des dépenses militaires annuelles aurait suffi pour atteindre les OMD (Objectifs du Millénaire pour le Développement) et sortir toute la population de la pauvreté extrême d’ici 2015», a-t-il affirmé.
Armes nucléaires :
- Bonne nouvelle : l'Ukraine a terminé jeudi dernier la destruction de l'intégralité des vecteurs d'ogives nucléaires et des armes de destruction massive, héritées de l'Union soviétique, se trouvant sur son sol, a confirmé le chef du département de recyclage et de déminage civil de l'entreprise Ukroboronservice, Konstantin Darkin au terme d'une cérémonie organisée dans la région de Khmelnitski (ouest) à l'occasion de la destruction du dernier missile soviétique Scud B.
- autre bonne nouvelle : le Siège des Nations unies, à New-York, présente depuis le 24 mars, deux tours de trois mètres de haut, formées par les 1,02 millions de signatures de pétitions, collectées par les "Maires pour la paix" pour la conférence du TNP de mai 2010 ("Les cités ne sont pas des cibles !"). Ce "monument", oeuvre d'art, a été inauguré par Ban Ki-moon et Michael Douglas, messager de la paix. Cette "installation" est la première oeuvre d'art permanente, provenant entièrement de la société civile, à figurer dans le hall des Nations unies.
- à savoir : Après les élections municipales du 10 avril à Hiroshima, le nouveau maire s'appelle M. Kazumi Matsui. C'est lui qui devient le nouveau président de "Mayors for peace" (Maires pour la paix) : souhaitons-lui bonne réussite et bon travail comme l'avait accomplis son prédécesseur M. Tadatoshi Akiba, devenu professeur à l'Université d'Hiroshima.
- Mauvaise nouvelle ? La Conférence du désarmement à Genève piétine toujours depuis treize ans et a achevé sa session du premier trimestre sans adopter de programme de travail. Certes, en début d'année, certains signes semblaient encourageants : les délégations d'Australie et du Japon avaient organisé des séminaires parallèles permettant de creuser certaines définitions et vérifications relatives à un éventuel traité d'interdiction des matières fissiles nucléaires ("cut-off"), des séances thématiques avaient eu lieu, y compris en lien avec la société civile. Mais le débat s'est de nouveau enlisé sur la nature du programme à voter, et surtout sur l'opposition entre le Pakistan seul état à refuser de discuter d'un Traité sur les matières fissiles et les positions intransigeantes des pays nucléaires et de l'Union européenne, en particulier de la France, refusant d'explorer toute voie originale ou inventive pour surmonter la crise.
Avant la reprise des séances prévue mi-mai, des voies s'élèvent, soit pour dire que le débat pourrait explorer d'autres domaines comme l'interdiction de la militarisation de l'espace (négociations PAROS), sujet qui semble évoluer positivement, soit, hypothèse plus risquée, de conduire des discussions ou négociations en dehors de la Conférence du désarmement...
Armes biologiques :
À Genève se déroule une réunion préparatoire à la 7e conférence d’examen de la Conférence d'interdiction des armes biologiques (CIAB), qui se déroulera en décembre 2011 à Genève. La CIAB compte 163 Etats-parties et 13 signataires, 19 pays ne l’ont encore ni signée, ni ratifiée. Rappelons que le point faible de cette Convention est de ne pas comporter de véritable dispositif de vérification au contraire de celle sur les armes chimiques (CIAC). George W. Bush avait fait capoter les négociations sur le point d'aboutir en 2002. Depuis, des progrès timides vers la confiance ont été faits mais un long chemin reste à parcourir sur un sujet très dangereux, avec de nouvelles générations d'armes biologiques risquant d'apparaître.