Ce blog est dédié aux problématiques de la paix et du désarmement, des institutions internationales (ONU, OTAN), à la promotion d'une culture de la paix. Textes sous license Creative Commons by-nc-sa
mardi 5 janvier 2021
"2021 - Année internationale de la paix et de la confiance ? - CHICHE !
En consultant mes notes pour préparer cet article, j'ai retrouvé une information que l'année 2020 et la pandémie nous avaient fait passer sous la table. Quelle est-elle ? C'est la résolution extraordinairement porteuse de sens de l'Assemblée générale des Nations unies qui a décidé le 12 septembre 2019 que 2021 serait "Année internationale de la paix et de la confiance" afin de mobiliser les efforts de la communauté internationale pour faire régner durablement la paix, la solidarité et l’harmonie comme elle dit dans la résolution.
Cette décision a été prise plusieurs mois avant que ne démarre le chaos créé par l'épidémie de la COVID-19. Avec le recul, en ce début 2021, quelle est sa validité ? Certains crieront, n'en doutez-pas, au "hors-sujet" ? Mais en considérant tous les enseignements que nous pouvons commencer à tirer de l'année 2020, on peut estimer que l'idée de faire de "2021, l'année de la paix" représente une formidable opportunité pour les peuples de la planète.
2020 nous a montré que le monde avait besoin de beaucoup de solidarité pour faire face aux grands problèmes de notre humanité. Hier et aujourd'hui, une pandémie mondialisée ; aujourd'hui et demain, un réchauffement climatique qui serait catastrophique ; hier, aujourd'hui, demain, un risque d'embrasement guerrier soudain avec les dizaines de milliers de têtes nucléaires toujours en état d'alerte et de moins en moins contrôlées par certains pays.
Solidarité mondiale, cela signifie développement des coopérations : coopération pour mettre partout à disposition des populations un vaccin bon marché et efficace, coopération pour relancer le développement, bloqué dans de très nombreux pays à cause de la pandémie, solidarité pour réactiver partout les programmes d'aide à la scolarisation, à l'accueil des réfugiés ou migrants. Ces solidarités, ces coopérations ont besoin d'institutions internationales fortes, donc d'une ONU revigorée, d'un multilatéralisme renforcé.
Comment le faire sans la paix et la confiance ?
Une autre conséquence de la crise relancée en 2020 est l'énorme besoin de ressources financières pour financer tous ces programmes, dans les pays en voie de développement mais aussi dans les pays industrialisées. Des milliards de dollars de dépenses ont été engagés, il faudra trouver de quoi les rembourser sans que cela ne retombe sur les salariés et les simples gens. Face à cette exigence, les 1 800 milliards de dollars engagés dans des dépenses militaires chaque année apparaissent encore plus incongrus et scandaleusement déplacés.
Il faut réduire drastiquement les budgets militaires mais pour cela cela, il faut renforcer la sécurité internationale.
Comment le faire sans la paix et la confiance ?
Relancer, dynamiser les grands accords et les grandes négociations internationales, sur le climat et l'accord de Paris, sur la paix au Moyen-Orient avec un État pour le peuple palestinien, avec la consolidation de l'accord sur le nucléaire iranien sont des grandes nécessités. Sans croire au miracle, le changement de président aux États-Unis le 21 janvier va représenter une opportunité politique pour remettre des processus diplomatiques sur des rails plus classiques.
Une autre grande "fenêtre d'action" se présentera le lendemain 22 janvier avec l'entrée en vigueur du traité sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN).
L'illégalité des armes nucléaires, de leur emploi, de leur possession, de leur construction, de leur stationnement va entrer dans le droit international. Bien sûr, au départ, cela ne concernera que les signataires, les États-parties, et les États nucléaires, qui n'ont pas signé ce Traité, n'y seront pas au début théoriquement soumis. Mais qui peut croire qu'une nouvelle ère ne va pas s'ouvrir dans le monde ? Le bon droit, le droit international aura changé de côté ! Chaque État nucléaire, la France comme les autres, devra répondre de sa posture. Pourquoi n'adhèreraient-ils pas à cette nouvelle norme mondiale ? Pourquoi s'arrogeraient-ils le droit de rester en dehors du droit ?
Chaque citoyen de chaque peuple, dans chacun des pays nucléaires, sera en droit d'interpeller son gouvernement. Pourquoi restons-nous hors-la-loi ? Que fait-on pour créer les conditions, de sécurité, de coopération, de contrôle afin que notre pays rejoigne la communauté du droit ?
L'hypothèque Trump levée aux USA, le TIAN en vigueur, oui, 2021 devrait connaître de nouvelles opportunités politiques pour les peuples, les militants pour un monde de paix, de justice et de coopérations, afin de développer de nouveaux rapports de forces. Oui, s'appuyer sur l'idée de "2021 - année internationale de la paix et de la confiance" sera un puissant levier pour nous donner la force de sortir du trouble et des brumes de cette "annus horribilis" qu'a été 2020 !
vendredi 1 janvier 2021
jeudi 29 octobre 2020
ONU : Et le mois d'octobre 2020 entra dans l'histoire
Le mois d'octobre est toujours un mois important dans la vie des Nations unies. C'est le 24 octobre 1945 qu'entra en vigueur la Charte des Nations unies, ce document fondateur de la grande alliance des peuples de la Terre qui commence de si belle façon : "Nous, peuples des Nations unies..". On peut considérer ce jour comme le jour anniversaire aussi de toute l'Organisation des Nations unies. En cette année 2020, nous célébrons le 75e anniversaire du rassemblement de 194 États maintenant sur la planète. En 1971, pour commémorer cet événement, l'Assemblée générale de l'ONU décida de faire du 24 octobre la "Journée des Nations unies". En 1978, l'Assemblée générale ajouta dans la foulée, du 24 au 30 octobre, une "Semaine du désarmement" pour rappeler le but premier de l'ONU : "Nous, peuples des Nations unies, RÉSOLUS, à préserver les générations futures du fléau de la guerre," et susciter des initiatives pour "booster" les progrès de celui-ci.
Le 24 octobre 2020 restera dans l'histoire de la paix et du désarmement puisque ce jour-là, un 50e État a ratifié le TIAN, Traité d'abolition des armes nucléaires, permettant son entrée en vigueur dès le 22 janvier prochain. Une situation absolument inédite est créée : pour la première fois, les armes nucléaires sont illégales. L'entrée en vigueur du Traité sur l'interdiction des armes nucléaires est l'aboutissement d'un mouvement mondial visant à attirer l'attention sur les conséquences humanitaires catastrophiques de toute utilisation d'armes nucléaires. Adopté le 7 juillet 2017 par 122 pays, lors d'une conférence des Nations Unies à New York, le Traité représente le premier instrument multilatéral juridiquement contraignant pour le désarmement nucléaire depuis deux décennies. Certes, les principales puissances nucléaires des États-Unis, du Royaume-Uni, de la Russie, de la Chine et de la France n'ont pas signé l'accord mais avec ce nouvel enrichissement du droit international, une situation inédite va s'ouvrir. L'idée que la meilleure manière de lutter contre les dangers des armes nucléaires est d'en interdire la possession trouve une traduction concrète sur laquelle vont s'appuyer des dizaines d'États et une opinion publique mondiale, tous décidés à faire entendre leur volonté de voir la planète débarrassée de ces armes de mort. Nous avons vécu une situation semblable lors de l'adoption de la Convention d'Ottawa, interdisant les mines anti-personnels. Les grands États poseurs de mines, États-Unis, Russie, Chine, ne la signèrent pas, mais de fait, l'appliquent aujourd'hui.
Dans ce contexte, la France, puissance nucléaire, qui veut parfois se présenter comme le pays "vertueux" par excellence, a une grande responsabilité. Va-t-elle ou non saisir l'opportunité de faire progresser notre planète dans la construction de la paix, va-t-elle jouer un rôle d'incitateur auprès des autres pays nucléaires ?
Si le mois d'octobre se termine ainsi par cette fantastique lueur d'espoir pour une majeure partie de l'humanité, il avait connu aussi un début peu ordinaire.
Le 2 octobre était célébrée comme depuis treize ans (2007), la "Journée internationale de la non-violence", date anniversaire de la naissance du Mahatma Gandhi, pionnier de la non-violence et artisan de l'indépendance indienne. Cette journée est toujours d'une grande importance morale pour réfléchir aux paroles de Gandhi : « La non-violence est la plus grande force que l’humanité ait à sa portée. Elle est plus puissante que l’arme la plus destructive inventée par l’ingéniosité de l’homme ». Cette année, elle a été marquée par l'Appel renouvelé du Secrétaire de l'ONU à mettre en oeuvre un cessez-le-feu mondial pour se consacrer selon ses paroles "à notre ennemi commun : la COVID-19". "Le seul vainqueur, au cours d’un conflit en pleine pandémie, c’est le virus" a-t-il insisté. Au moment où se profile sur une partie importante du globe une nouvelle flambée de l'épidémie, ne faut-il pas faire pression sur tous les dirigeants, dans toutes les enceintes, pour redoubler d’efforts pour que ce cessez-le-feu mondial devienne une réalité d’ici à la fin de l’année, ce qui, selon Antonio Gutteres, "atténuerait d’immenses souffrances, réduirait le risque de famine et créerait des espaces de négociation en vue de la paix" ?
Une semaine après la journée de la non-violence, une autre nouvelle a réjoui tous ceux qui considèrent l'ensemble du système onusien comme essentiel dans la marche du monde aujourd'hui (voir mon article "75e anniversaire ONU : si elle n'existait pas, il faudrait l'inventer...").
Le 9 octobre, le prix Nobel de la paix a été décerné au Programme alimentaire mondial des Nations unies - le PAM - créé en 1962. Le PAM, qui emploie 17 000 personnes, est entièrement financé par des dons, la plupart venant des États. Il a levé 8 milliards de dollars en 2019. À travers le monde, pas moins d’1,1 million de femmes et d’enfants de moins de 5 ans reçoivent chaque mois un appui nutritionnel de la part du PAM. Il œuvre actuellement en Syrie, en République démocratique du Congo, au Nigeria, dans les États frappés par Boko Haram, au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Sud-Soudan. Le PAM se concentre sur l’aide d’urgence, ainsi que sur la reconstruction et l’aide au développement. Deux tiers de son travail s’effectue dans des zones de conflit. Mais il joue aussi un rôle éducatif dans la promotion d'une bonne alimentation avec des programmes alimentaires, éducatifs, nutritionnels. Le PAM est un exemple éclatant du rôle essentiel que joue la majorité des agences de l'ONU (PNUD, FAO, OMS, UNICEF, UNESCO, etc).
Enfin, dernière date de ce mois d'octobre exceptionnel, il faut noter que le 24 octobre célébrait aussi la "Journée mondiale d’information sur le développement". Cette journée vise à rappeler que les technologies de l'information et des communications représentent un formidable potentiel pour la réalisation des objectifs de développement durable. Des progrès considérables ont été accomplis ces dernières années dans l'accès aux technologies de l'information et des communications, notamment en ce qui concerne la progression régulière de l'accès à Internet (qui touche maintenant plus du quart de la population mondiale), la multiplication des propriétaires de téléphone portable et la disponibilité de contenu et de sites multilingues. Mais il reste néanmoins nécessaire de réduire la fracture numérique et de faire en sorte que les bienfaits des nouvelles technologies, surtout de l'information et des communications, s'offrent à tous. Il y a deux grands enjeux dans le développement des nouvelles technologies : le premier est de ne pas laisser la maîtrise de celles-ci aux seules mains des grandes sociétés privées et notamment des fameux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ce qui souligne l'importance de la place des "logiciels libres". Le second enjeu est celui des contenus et de leur manipulation éventuelle. Comme l'a rappelé Antonio Gutteres, le monde doit être sûr que « les communications numériques contribuent à la paix et ne sont pas utilisées à mauvais escient pour répandre la haine et l'extrémisme ». Nous reviendrons dans un prochain article sur ces deux problématiques.
Décidément, oui, si l'on prend un peu de recul, malgré le poids très lourd que fait peser sur une partie de la planète la relance de la pandémie de la COVID-19, ce mois d'octobre 2020 a été exceptionnel. Il a brisé la "morosité" politique ambiante et marquera sans doute l'histoire mondiale récente en montrant concrètement que l'avenir est au renforcement du multilatéralisme et de la coopération internationale dans la construction d'un monde de demain meilleur.
dimanche 18 octobre 2020
Je défends la liberté d'expression
Nous sommes tous concernés face à l'assassinat commis contre Samuel Paty, professeur d'histoire à Conflans-Sainte-Honorine. Il est nécessaire de se rassembler largement dans la condamnation de cet acte terroriste odieux.
Au travers de ce professeur, ce sont tous les enseignants qui sont touchés dans leurs missions fondamentales d’éducation, visant à donner à chaque individu les moyens d’analyse de la réalité, et donc les moyens de sa liberté de conscience. Défendre ces hommes et ces femmes en charge de ces missions, sur tous les sujets (liberté de conscience, d’expression, égalité des genres, laïcité, éducation à la citoyenneté et à la tolérance…) est fondamental quelles que soient les pressions et leurs auteurs. C'est ce large débat qui être mené demain sans en restreindre le champ et sans instrumentalisation politicienne.
dimanche 4 octobre 2020
Covid-19 : si on changeait d'heure ?
L'irruption, le développement puis le maintien de la pandémie de la Covid-19 pèsent sur notre vie personnelle, notre activité citoyenne locale, notre vie commune nationale mais aussi sur la situation internationale, les rapports entre États, les manières de vivre des populations de la planète.
Au plan local, une étrange torpeur engourdit la vie démocratique et sociale. Les activités de la vie associative, syndicale sont réduites comme peau de chagrin, suspendues ou gelées. Des restrictions démocratiques (droits de se réunir, de circuler, de manifester) jamais vues hors périodes de l'Occupation et de la guerre de 14-18, sont acceptées avec peu de réactions sinon très symboliques (le dernier vote prolongeant l'état d'urgence sanitaire pour six mois cette semaine s'est déroulé devant moins de 50 députés, avec aucune intervention publique, pétitions ou délégations). On semble attendre que l'orage passe, subsiste encore l'illusion à tous les niveaux qu'il y aura peut-être des "lendemains qui chantent" ou une "sortie du tunnel". Mais en réalité, il n'y aura pas de "monde de demain" mais seulement un "monde d'aujourd'hui" bien réel. Il n'y aura pas d'ère "post-Covid" comme il n'y a pas eu d'ère "post-ViH" par exemple. Il faut apprendre à dominer "la bête" et vivre, vivre mieux tout en la maîtrisant. Depuis plusieurs mois et ce fut passionnant, ont fleuri dans les médias, des réflexions d'intellectuels, de politologues sur "le monde d'après", le "monde de demain" mais avec souvent la faiblesse de ne pas intégrer le "monde d'aujourd'hui" dans ces projections.
Comment le faire ? Essayons d'imaginer que l'humanité vit sous un cyclone mais qui se serait installé de manière permanente sur nos têtes, avec de simples modalités d'intensité. Nous devons donc, dans le vent et la pluie, continuer à vivre, consolider notre maison et améliorer son confort, resserrer le contact et l'entraide avec les voisins, trouver des solutions pour aller travailler, pour assurer la scolarité de nos enfants. Il nous faut bien sûr être bien habillés, avec bottes et cirés, mais l'enjeu n'est pas uniquement de nous protéger mais de vivre, construire notre vie avec nos voisins tout en nous protégeant. C'est cela notre défi, où aucune exigence n'est rabaissée mais où des solutions originales et concrètes doivent être trouvées pour poursuivre notre marche en avant. Pour mobiliser les citoyens sur cette attitude de lucidité, nous n'avons pas besoin d'informations anxiogènes, mais de transparence, de responsabilisation et de mesures concrètes et adaptées aux situations réelles au lieu de mesures globales, plus punitives qu'efficaces. Si on veut faire redémarrer la vie associative, par exemple, avant qu'une partie du tissu social ne se déchire, notamment pour tout ce qui concerne les retraités, le 3e âge, il ne suffira pas d'ajouter quelques financements complémentaires mais de monter des dispositifs humains au niveau des collectivités locales pour aider ces associations à gérer les nouvelles contraintes de fonctionnement qui, sinon, apparaîtront comme insurmontables et empêcheront les reprises d'activités.
En bref, il faut effectuer un changement d'horaire : ce mois d'octobre est traditionnellement celui des changements d'heure. Mettons nos pendules à l'heure... mais de la Covid-19 et agissons dans ce cadre.
Au niveau international, le même raisonnement prévaut. En effet, quels sont les grands traits de la situation nouvelle actuelle ?
Profitant de la confusion liée à la pandémie, des puissances régionales montrent leurs muscles et gesticulent au risque de relancer des tensions guerrières dramatiques comme la Turquie en Méditerranée ou en Tunisie, la Chine à Hong-Kong ou Taïwan, les États-Unis qui annulent le traité INF sur les "euromissiles" ou boycottent l'OMS et la Cour pénale internationale. Peut-on laisser faire ces dérives et cette situation ne montre-t-elle pas que des défis anciens doivent aujourd'hui être considérés de manière nouvelle?
« Le virus est aujourd'hui la principale menace mondiale pour la sécurité dans notre monde » a rappelé Antonio Gutteres, secrétaire général des Nations unies. À l'heure de la COVID-19, le "tissu social planétaire", qu'on appelle le plus souvent "multilatéralisme" risque de se déchirer sous les assauts des individualismes nationaux, des égoïsmes de puissances. Or, le gage de survie et d'avenir pour la communauté mondiale est de consolider ce "filet de sécurité" que nous avons tissé et tissons obstinément depuis 75 ans. Il s'agit de la multitude de traités et d'accords internationaux, de l'action des dizaines d'institutions et d'agences de l'ONU, de l'organisation de forums, de lieux de rencontres autour de "l'arbre à palabres" onusien qui ont commencé de "civiliser" les relations internationales. Toutes ces procédures provoquent parfois des pertes de temps mais sont indispensables pour nouer les compromis et les accords politiques qui construisent la vie commune de notre humanité.
Nous sommes face à plusieurs autres défis que j'ai soulignés dans mon article précédent sur le 75e anniversaire des Nations unies.
Le premier défi est celui du multilatéralisme et de la gouvernance mondiale et la nécessité de tout faire pour les défendre.
Le deuxième défi est de ne pas laisser la pandémie nous faire revenir en arrière sur le plan de la lutte contre la pauvreté et les inégalités mondiales.
Le troisième défi est celui de dégager des nouveaux moyens pour l'action de la communauté internationale dans cette période difficile, au travers de la lutte contre certains super-profits et contre les dépenses inutiles comme les dépenses militaires.
Mais le principal défi pour moi, ne consiste-t-il pas dans la capacité des dirigeants étatiques, des animateurs de la société civile, à ne pas rétrécir l'horizon des propositions d'actions mais au contraire à faire preuve d'audace et d'innovation des maintenant ?
Alors qu'il existe une pression des forces économiques dominantes pour rétrécir les champs d'actions au sanitaire et à l'économique (sous forme d'aide sans contrôle aux entrepreneurs), ne faut-il pas soutenir les propositions hardies du Secrétaire général de l'ONU qui plaide pour « une nouvelle génération de protection sociale, y compris pour les plus vulnérables, basée sur la couverture maladie universelle et la possibilité d'un revenu de base universel » ou qui juge nécessaire « de faire face aux profondes inégalités qui empêchent la dignité et les opportunités pour tous » et préconise d'investir davantage dans la cohésion sociale, en « reconnaissant que la diversité est une richesse et non une menace » ?
Sur le plan de la paix et du désarmement, la communauté internationale va ainsi être, très bientôt, confrontée à un nouveau challenge. Dans quelques semaines, le TIAN (traité d'interdiction des armes nucléaires) va recueillir les 50 ratifications nécessaires des États pour son entrée en vigueur. L'humanité va avoir une chance historique d'ouvrir une voie concrète pour l'élimination à jamais de ces armes redoutables et inhumaines.
Les gouvernements de la planète vont-ils saisir cette chance ? Les États nucléaires vont-il se raidir dans leur opposition ? Les États hésitants vont-ils s'enhardir pour dire : "oui, vraiment, il est temps d'essayer" ? Les États promoteurs de l'interdiction vont-ils faire preuve d'initiatives et d'ouverture diplomatique pour faire avancer les négociations pour une application concrète de l'interdiction ? Enfin, les forces de la société civile vont-elles réussir à faire de ce chantier une grande cause de l'humanité ?
Pour impulser ces grandes visions d'avenir, comme je l'ai écrit dans un dernier article, nous avons un outil, les Nations unies, mais travaillons à ce qu'il intègre vraiment "la société civile, les villes, les entreprises, les collectivités et la jeunesse », comme le souhaite le Secrétaire général de l'ONU. Ce doit être au coeur des réformes nécessaires de l'institution.
N'attendons pas des "jours meilleurs", des jours "post-covid", si incertains, tant au plan local de nos sociétés qu'à l'échelle internationale.
"Demain" ne se construit-il pas "aujourd'hui", dans "la lutte obstinée de ce temps quotidien" comme l'écrit le poète ?
Daniel Durand
Directeur de l'Institut de documentation et de recherches pour la paix (IDRP)
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Covid-19: what if we change the time?
The outbreak, development and then the maintenance of the Covid-19 pandemic weighs on our personal life, our local civic activity, our national life together, but also on the international situation, the relations between States, the way of life of the populations of the planet.
At the local level, a strange torpor is numbing democratic and social life. The activities of associations and trade unions are reduced to a state of sadness, suspended or frozen. Democratic restrictions (rights to meet, to move around, to demonstrate) never seen outside the periods of the Occupation and the war of 14-18, are accepted with little if any symbolic reaction (the last vote extending the state of health emergency for six months this week took place before less than 50 deputies, with no public intervention, petitions or delegations). We seem to be waiting for the storm to pass, and the illusion remains at all levels that there may be a "tomorrow that sings" or a "way out of the tunnel". But in reality, there will be no "tomorrow's world" but only a very real "today's world". There will be no "post-Covid" era, just as there has been no "post-ViH" era, for example. We must learn to dominate "the beast" and live, live better while mastering it. For several months now, and it has been fascinating, there have been many reflections in the media by intellectuals and political scientists on the "world after", the "world of tomorrow", but often with the weakness of not integrating the "world of today" into these projections.
How can this be done? Let's try to imagine that humanity lives under a cyclone, but which would have settled permanently on our heads, with simple modalities of intensity. We must therefore, in the wind and rain, continue to live, consolidate our house and improve its comfort, strengthen contact and mutual aid with our neighbours, find solutions to go to work, to ensure the schooling of our children. Of course we must be well dressed, with boots and oilskins, but the challenge is not only to protect ourselves but to live, to build our life with our neighbours while protecting ourselves. This is our challenge, where no requirements are lowered but where original and concrete solutions must be found to continue our progress. To mobilise citizens on this attitude of lucidity, we do not need anxiety-provoking information, but transparency, accountability and concrete measures adapted to real situations instead of global measures, more punitive than effective. If we want to restart associative life, for example, before part of the social fabric is torn apart, particularly as regards pensioners and the elderly, it will not be enough to add a few extra funds but to set up human resources measures at local authority level to help these associations manage the new operating constraints which will otherwise appear insurmountable and prevent them from resuming their activities.
In short, a change of schedule must be made: October is traditionally the month of time changes. Let's set our clocks to the right time... but the Covid-19 and let's act accordingly.
At the international level, the same reasoning prevails. Indeed, what are the main features of the current new situation?
Taking advantage of the confusion linked to the pandemic, regional powers are showing their muscles and gesticulating at the risk of relaunching dramatic war tensions, such as Turkey in the Mediterranean or Tunisia, China in Hong Kong or Taiwan, the United States cancelling the INF treaty on "euromissiles" or boycotting the WHO and the International Criminal Court. Can we allow these abuses to continue and does this not show that old challenges must now be considered in a new way?;
"The virus is today the main global threat to security in our world", said UN Secretary-General Antonio Gutteres. At the time of COVID-19, the "planetary social fabric", most often referred to as "multilateralism", is in danger of being torn apart by the onslaught of national individualism and the selfishness of powers. The guarantee of survival and the future for the world community is to consolidate this "safety net" that we have been obstinately weaving and weaving for 75 years. It is the multitude of international treaties and agreements, the action of dozens of UN institutions and agencies, the organisation of forums and meeting places around the UN "palaver tree" that have begun to "civilise" international relations. All these procedures sometimes waste time, but they are essential for reaching the compromises and political agreements that build the common life of the United Nations.
We face several other challenges that I highlighted in my previous article on the 75th anniversary of the United Nations.
The first challenge is that of multilateralism and global governance and the need to do everything possible to defend them.
The second challenge is not to let the pandemic make us turn back the clock on the fight against poverty and global inequality.
The third challenge is to find new ways for the international community to act in these difficult times, through the fight against certain super-profits and against unnecessary spending such as military spending.
But the main challenge for me is not the capacity of state leaders, of civil society leaders, not to narrow the horizon of proposals for action but, on the contrary, to show boldness and innovation now.
At a time when there is pressure from the dominant economic forces to narrow the fields of action to health and the economy (in the form of unchecked aid to entrepreneurs), should we not support the bold proposals of the UN Secretary General who advocates for "a new generation of social protection, including for the most vulnerable, based on universal health coverage and the possibility of a universal basic income" or which considers it necessary "to address the deep inequalities that prevent dignity and opportunities for all" and advocates greater investment in social cohesion, "recognising that diversity is a richness and not a threat"?
In the field of peace and disarmament, the international community will thus very soon be faced with a new challenge. In a few weeks' time, the TIAN (Treaty on the Prohibition of Nuclear Weapons) will receive the 50 ratifications required from States for its entry into force. Humanity will have a historic opportunity to pave the way for the elimination of these dreadful and inhuman weapons forever.
Will the world's governments seize this opportunity? Will the nuclear states stiffen in their opposition? Will hesitant states take the bold step of saying "yes, really, it is time to try"? Will pro-banning states show initiative and diplomatic openness to move negotiations forward towards a concrete implementation of the ban? Finally, will the forces of civil society succeed in making this project a great cause for humanity?
To give impetus to these great visions for the future, as I wrote in a last article, we have a tool, the United Nations, but let's work to ensure that it really integrates "civil society, cities, businesses, communities and youth", as the UN Secretary General wishes. This must be at the heart of the necessary reforms of the institution.
Let's not wait for "better days", "post-covid" days, which are so uncertain, both locally in our societies and internationally.
Isn't "tomorrow" being built "today", in "the obstinate struggle of this daily time" as the poet writes?
Daniel Durand
Director of the Institute for Documentation and Research for Peace (IDRP)
Translated with www.DeepL.com/Translator (free version)
mercredi 23 septembre 2020
75e anniversaire ONU : si elle n'existait pas, il faudrait l'inventer...
En 2015, nous avons commémoré le 70e anniversaire des Nations unies en ayant tous en tête un autre anniversaire : celui de la fin de la 2e Guerre mondiale. Nous avons alors émis des critiques, fait des propositions pour une plus grande efficacité de l'ONU, mais, je dirais, sur un mode "tranquille", en ayant le sentiment que le temps nous appartenait pour façonner un monde meilleur.
En 2020, nous ne pouvons pas célébrer le 75e anniversaire de l'organisation de la même manière. La donne a changé considérablement avec la pandémie de la Covid-19 : celle-ci ébranle les solidarités internationales, creuse la pauvreté et les inégalités, favorise de nouvelles insécurités, en bref, met à mal le multilatéralisme.
Un constat me semble largement partagé : nous avons besoin plus que jamais, de solidarités mondiales, d'approches globales face à ces phénomènes de pandémies, de réchauffement climatiques, de flux de réfugiés, phénomènes qui dépassent les frontières des États, les limites mêmes des continents. Cette grande leçon d'interdépendance infligée par la pandémie avec ses conséquences sur l'emploi, la scolarisation, renforce le besoin d'enceintes où puissent se rencontrer tous les pays, d'organismes qui coordonnent les efforts sur les plans du sanitaire, du développement, de l'aide aux enfants et aux réfugiés, d'un ensemble d'accords et de traités pour réguler tout cela.
Seuls les aveugles ou les fous ne voient pas que nous avons déjà sous la main, tous ces outils avec l'Organisation des Nations unies, régie par une Charte exemplaire, avec des dizaines d'institutions couvrant tous les secteurs de la vie des populations mondiales, avec la définitions de normes, d'accords et de traités multiples qui tissent un filet de protection et de sécurité tel que l'humanité ne l'a jamais connu de son histoire. On voit bien que si l'ONU n'existait pas, il faudrait l'inventer...
Il s'agit d'une telle évidence qu'à l'ouverture de la nouvelle session de l'Assemblée générale ce 21 septembre, TOUS les pays ont adopté par consensus une déclaration commune qui dit : « Il n’existe pas d’autre organisation mondiale qui ait la légitimité, la puissance de rassemblement et le pouvoir normatif de l’Organisation des Nations Unies. Il n’en existe pas d’autre qui puisse donner à autant de personnes l’espoir d’un monde meilleur et faire que l’avenir que nous voulons se réalise. Il a rarement été aussi vital que tous les pays se rassemblent pour tenir la promesse des nations unies ».
Oui, aucun chef d'État n'a été assez fou pour s'opposer à cette affirmation même s'il n'en pense pas moins !
Cela signifie à mon sens que la question centrale du débat n'est pas comme certains voudraient le faire croire : "l'ONU, à quoi ça sert ?" mais, dès aujourd'hui, "à quoi cela doit-il servir ?".
Les agences de l'ONU ont mené une grande consultation mondiale depuis le 1er janvier auprès d'un million de personnes : que disent celles-ci ? Comme l'a dévoilé le Secrétaire général, M. Gutterès, « Les participants [..] estiment que la coopération internationale est indispensable pour faire face aux réalités de notre époque ». « Ils ont relevé que la pandémie de Covid-19 rendait cette solidarité plus urgente encore. Et ils ont souligné que le monde avait besoin de systèmes de santé et de services de base universels », a-t-il ajouté. « Les gens craignent la crise climatique, la pauvreté, les inégalités, la corruption et la discrimination systémique fondée sur la couleur de peau ou le genre ».
Les chefs d'État de la planète ont ainsi une feuille de route toute tracée. Chacun doit prendre ses responsabilités. Antonio Guetterès a souligné que "personne ne souhaite de gouvernement mondial – mais nous devons œuvrer de concert pour améliorer la gouvernance mondiale ».
Cet appel à la responsabilité ne concerne pas que les chefs d'États : « Nous avons également besoin d’un multilatéralisme qui soit inclusif et s’appuie sur la société civile, les villes, les entreprises, les collectivités et la jeunesse », a-t-il ajouté.
Face aux coups de boutoir portés par le Covid-19, il faut reformuler sans attendre clairement les priorités d'abord à la jeunesse, à l'éducation. Selon l'Unesco, actuellement, 50 % des enfants du monde n'iraient pas à l'école à cause de la Covid-19 ! Et le Président Macron ne dit pas un mot dans sa déclaration à l'Assemblée générale, ce lundi, pour proposer, par exemple, au nom de la France que soit organisée une grande conférence internationale de soutien et de relance de la scolarisation de tous les enfants du monde ? Impensable !
Une autre priorité est celle des populations les plus faibles. Selon un rapport publié par le Haut Commissariat aux Réfugiés, la pandémie de Covid-19 constitue un « véritable effet multiplicateur », augmentant les besoins des réfugiés dans de nombreux pays, tout en les rendant encore plus difficiles à satisfaire. A ce jour, le HCR n’a reçu que 49% (soit 4,5 milliards de dollars) sur le montant de 9,1 milliards de dollars nécessaires à ses opérations mondiales cette année.
La question des financements est cruciale : ne faut-il pas insister sur l'idée de mobiliser l'argent réel sur les plans nationaux et internationaux, notamment en exigeant une action concertée européenne contre les profits exagérés comme ceux des GAFA ?
L'autre action d'urgence de recherche de financement ne doit-elle pas être de s'attaquer enfin franchement aux dépenses improductives et nuisibles que constituent les dépenses d'armement qui dépassent aujourd'hui les 1700 Mds de dollars annuels ?
Le Secrétaire général des Nations unies avait déjà appelé fin mars à un cessez-le-feu mondial afin de combattre plus efficacement la pandémie.
N'est-il pas temps d'appeler d'urgence à un moratoire, un gel mondial sur les dépenses d'armement et les budgets militaires, une sorte de "moratoire COVID" ?
Être lucide sur la durée de la pandémie n'oblige pas, à mon sens, à rétrécir notre horizon mais au contraire à faire preuve d'audace et d'innovation des maintenant.
Un des grands mérites des Nations unies est d'avoir été et d'être toujours une formidable caisse de résonance pour les grands défis de notre époque. Elles l'ont été pour la décolonisation, pour le développement humain et la sécurité humaine. Elles peuvent l'être pour la démilitarisation du monde à condition de ne pas attendre un hypothétique "post-covid" mais au contraire, d'affirmer : c'est le moment pour que "tout le monde se lève pour l'ONU" !
jeudi 30 avril 2020
Multilatéralisme et diplomatie, remèdes miracles de "l'après" ?
Dans les flux d'informations se déversant chaque jour autour de la pandémie du COVIT-19, une journée-anniversaire internationale est passée un peu inaperçue vendredi dernier, alors que sa thématique sous-tend la majorité des débats sur "l'après" crise sanitaire dans le monde.
Nous avons en effet célébré, pour la seconde fois seulement, il est vrai, la Journée internationale du multilatéralisme et de la diplomatie au service de la paix.
Celle-ci avait été proclamée par l'Assemblée générale des Nations Unies (A/RES/73/127) , le 12 décembre 2018, et fut célébrée pour la première fois le 24 avril en 2019. C'était une demande des pays non-alignés et elle fut adoptée malgré l'opposition des États-Unis et Israël.
Les concepts portés par cette journée sont essentiels pour accomplir des progrès en matière de paix et de sécurité, de développement durable et de droits de l'homme qui sont les trois piliers de l'Organisation des Nations Unies. Il faut rappeler que l'engagement de régler les différends par des moyens pacifiques et non par la force fait partie des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies dont nous fêterons en octobre prochain le 75e anniversaire.
La pandémie de COVID-19 montre à quel point, aujourd'hui, nous vivons dans un monde interdépendant : "Nous sommes tous dans le même bateau", a déclaré à juste titre, Antonio Gutterès, le Secrétaire général de l'ONU.
Or que constatons-nous ? Dans cette situation dramatique, les débats lancés à l'échelle internationale cachent mal les rivalités de puissance sous-jacentes. Les États-Unis relancent leur confrontation avec la Chine, inquiets de l'influence de celle-ci dans un certain nombre d'institutions, du fait de sa politique de présence et de lobbying. Les autres puissances occidentales lui emboîtent le pas, Emmanuel Macron suit à sa manière, les grands journaux français multiplient les articles, au contenu souvent plus idéologique que vraiment rigoureux : "L’OMS, une organisation affaiblie face à la stratégie sanitaire chinoise" (Le Monde), "Comment la Chine tire les ficelles de l’Organisation mondiale de la santé" (Le Figaro), "La Chine profite de la pandémie pour infiltrer l’OMS" (Valeurs actuelles).
Cette polémique rappelle que le système multilatéral actuel, et notamment le système onusien, est un système intergouvernemental, reposant en permanence sur des compromis entre les intérêts des États qui tous, essaient d'y gagner des positions idéologiques (le "soft-power"). Le reproche fait à la Chine pour l'OMS vaut pour la France et l'Unesco, par exemple.
En permanence, doit donc se créer une pression diplomatique et d'opinion pour que les intérêts de la communauté prennent le pas sur les intérêts égoïstes des États. Or aujourd'hui, la pandémie de COVID-19 est une tragédie qui vient nous rappeler à quel point nous sommes unis les uns aux autres. Pour combattre le virus, "il nous faut œuvrer, ensemble, comme une même famille humaine" a rappelé Antonio Guterres, affirmant avec force, « Le temps est maintenant à l’unité ».
Il est clair que l'action de l'OMS est absolument essentielle aux efforts menés au niveau mondial pour gagner la guerre contre la COVID-19. Le débat sur le rôle de l'OMS dans la déclaration de la pandémie doit certes rester ouvert, tout comme la manière dont les grands pays ont abordé l'analyse de cette crise, mais je partage l'opinion, pourtant très critique sur le rôle de la Chine, du spécialiste de l'Institut Montaigne, François Godement, le 24 mars dernier : "La mutualisation des efforts que l'OMS permet - même si elle n’est pas en mesure d’atteindre cet objectif par elle-même - , tout comme sa capacité à relayer les informations, les "meilleures pratiques" et des lignes directrices, restent irremplaçables".
Et à côté de l'OMS, on voit combien les autres institutions des Nations unies sont, elles aussi, irremplaçables dans cette situation de crise, que ce soit la FAO pour empêcher que la faim dans le monde ne refasse un bond, l'UNRWA pour empêcher que les camps de réfugiés n'explosent sous la contamination, etc..
Combattre la politique d'affrontement international brutal d'un Donald Trump, privilégier toujours la diplomatie et les réponses politiques aux crises, sont donc essentiels et on peut se féliciter qu'Emmanuel Macron s'efforce d'obtenir depuis quinze jours que le Conseil de sécurité et d'abord les cinq "Grands" se mettent d'accord pour soutenir et renforcer la coopération internationale, mais... Est-ce suffisant ?
Antonio Guterres a eu une parole forte le 24 avril en affirmant : "Il ne suffit pas de clamer les vertus du multilatéralisme : nous devons continuer à prouver qu’il est plus qu’utile".
Pour le responsable de l'ONU, il faut explorer deux directions, la première est "un multilatéralisme en réseau, dans lequel la coopération entre toutes les organisations multilatérales mondiales soit renforcée et auquel les organisations régionales puissent apporter une contribution vitale".
Cela pose la question du renforcement notamment des liens de l'Union européenne et de l'ONU. Pour moi, comme je l'ai déjà souvent écrit, la vocation de l'Union européenne n'est pas de devenir un pôle de puissance d'affrontement mais un pôle de puissance positive, au service de la paix, de la prévention des conflits et du développement durable. C'est dans ce sens que peut se concevoir une coopération militaire européenne, éventuellement pour aider les Nations unies dans les processus de rétablissement et consolidation de la paix. C'est d'ailleurs cette orientation qui permettrait un dépérissement progressif du rôle de l'OTAN et de sa disparition à terme.
La deuxième idée avancée par Antoinio Gutterès est celle "d'un multilatéralisme inclusif, qui repose sur des liens étroits avec la société civile, les entreprises, les autorités locales et régionales et les autres parties prenantes...".
C'est une idée, elle aussi importante, surtout en cette année du 75e anniversaire de la création des Nations unies. Le multilatéralisme aujourd'hui ne peut reposer sur la seule coopération entre États.
Il faut inventer, imaginer de nouvelles solutions, mais qui doivent reposer sur un postulat fondamental : les peuples et l'humain (le "We, the people" de Koffi Annan, reprenant la première phrase de la Charte des Nations unies) doivent être au centre des politiques internationales.
Un multilatéralisme "inclusif" : il est nécessaire que ce concept émerge du débat sur toute réforme de l'organisation onusienne et irrigue, par exemple, la réflexion sur une meilleure représentation des États émergents comme nouveaux membres permanents au Conseil de sécurité, et une représentation plus directe des peuples à côté de l'Assemblée générale des États, avec la création d'Assemblée des peuples, une Assemblée parlementaire mondiale ?
Alors, oui, dans le monde d'aujourd'hui, il ne "suffit pas de clamer les vertus du multilatéralisme", "encore faut-il le faire plus clairement : tous les progressistes, en particulier, doivent réaffirmer plus haut, plus fort, qu'un monde meilleur sera forcément un monde de coopérations multiples, plaçant sécurité humaine et culture de paix au coeur de ses objectifs, proclamer sans restriction et contorsion de langage, que ce monde se développera au sein de notre maison commune, les Nations unies. Deuxièmement, cet engagement doit se se traduire dans des actions politiques concrètes face à cette pandémie qui est aussi une crise mondiale multi-facettes, prioritairement, selon moi, autour de ces grands objectifs : "cessez le feu mondial", "baisse des dépenses d'armements au service du développement et de la transition énergétique". Alors, oui, multilatéralisme et diplomatie seront parmi les remèdes miracles essentiels de "l'après".
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Multilateralism and diplomacy, miracle cures for the "after"?
In the daily flow of information surrounding the VITOC-19 pandemic, an international anniversary day went somewhat unnoticed last Friday, even though its theme underpins most of the debates on the "after" health crisis in the world.
Indeed, we celebrated, admittedly only for the second time, the International Day of Multilateralism and Diplomacy for Peace.
This was proclaimed by the United Nations General Assembly (A/RES/73/127) on 12 December 2018, and was celebrated for the first time on 24 April 2019. It was a request of the non-aligned countries and was adopted despite the opposition of the United States and Israel.
The concepts carried by this day are essential to achieve progress in peace and security, sustainable development and human rights, which are the three pillars of the United Nations. It should be recalled that the commitment to resolve disputes by peaceful means and not by force is one of the fundamental principles of the United Nations Charter, whose 75th anniversary we will celebrate next October.
The COVID-19 pandemic shows the extent to which today we live in an interdependent world: "We are all in the same boat", UN Secretary-General Antonio Gutterès rightly said.
But what do we see? In this dramatic situation, the debates launched at the international level do little to conceal the underlying power rivalries. The United States is re-launching its confrontation with China, worried about the latter's influence in a number of institutions, due to its presence and lobbying policy. The other Western powers follow suit, Emmanuel Macron follows in his own way, the major French newspapers multiply articles, often with content that is more ideological than really rigorous: "The WHO, an organisation weakened in the face of China's health strategy" (Le Monde), "How China is pulling the strings of the World Health Organisation" (Le Figaro), "China takes advantage of the pandemic to infiltrate the WHO" (Valeurs actuelles).
This polemic reminds us that the current multilateral system, and in particular the UN system, is an intergovernmental system, permanently based on compromises between the interests of States, which all try to win ideological positions (the "soft power"). The criticism levelled at China for the WHO applies to France and UNESCO, for example.
There must therefore be constant diplomatic pressure to ensure that the interests of the community take precedence over the selfish interests of States. Today, however, the COVID-19 pandemic is a tragedy that reminds us how united we are. To fight the virus, "we must work together as one human family," Antonio Guterres reminded us, forcefully asserting, "The time has come for unity.
It is clear that WHO's action is absolutely essential to global efforts to win the war against VIDOC-19. The debate on the role of WHO in declaring the pandemic must certainly remain open, as must the way in which the major countries have approached the analysis of this crisis, but I share the opinion, which is very critical of the role of China, of the specialist from the Montaigne Institute, François Godement, on 24 March last: "The pooling of efforts that the WHO makes possible - even if it is not able to achieve this objective on its own - as well as its ability to relay information, best practices' and guidelines, remain irreplaceable'.
And alongside the WHO, we can see how irreplaceable the other United Nations agencies are in this crisis situation, whether it is the FAO to prevent world hunger from taking another leap forward, UNRWA to prevent refugee camps from exploding under contamination, etc.
Fighting the policy of brutal international confrontation of a Donald Trump, always favouring diplomacy and political responses to crises, are therefore essential and we can be pleased that Emmanuel Macron has been trying for the past fortnight to get the Security Council and first of all the five "Great" countries to agree to support and strengthen international cooperation, but ... Is that enough?
Antonio Guterres had a strong word on 24 April when he said: "It is not enough to proclaim the virtues of multilateralism: we must continue to prove that it is more than useful".
For the head of the UN, two directions must be explored. The first is "a networked multilateralism, in which cooperation between all the world's multilateral organizations is strengthened and to which regional organizations can contribute their expertise".
That raises the question of strengthening the ties between the European Union and the United Nations. For me, as I have often written, the vocation of the European Union is not to become a pole of confrontational power but a pole of positive power, in the service of peace, conflict prevention and sustainable development. It is in this sense that European military cooperation can be conceived, possibly to help the United Nations in the processes of peacemaking and peace-building. It is, moreover, this is the direction that would allow NATO's role to gradually wither and eventually disappear.
The second idea put forward by Antoinio Gutterès is that of "an inclusive multilateralism, based on close links with civil society, business, local and regional authorities and other stakeholders.
This is an idea that is also important, especially in this year of the 75th anniversary of the creation of the United Nations. Multilateralism today cannot be based on cooperation between states alone.
It is necessary to invent, to imagine new solutions, but they must be based on a fundamental postulate: the peoples and the human being (Koffi Annan's "We, the people", taking up the first sentence of the United Nations Charter) must be at the centre of international policies.
An "inclusive" multilateralism: it is necessary that this concept emerges from the debate on any reform of the UN organisation and irrigates, for example, the reflection on a better representation of emerging States as new permanent members in the Security Council, and a more direct representation of peoples alongside the General Assembly of States, with the creation of an Assembly of Peoples, a global parliamentary assembly?
So, yes, in today's world, it is not "enough to proclaim the virtues of multilateralism", "it must be done more clearly: all progressives, in particular, must reaffirm more loudly and more forcefully that a better world will necessarily be a world of multiple cooperation, placing human security and a culture of peace at the heart of its objectives, proclaiming without restriction and contortion of language, that this world will develop within our common home, the United Nations. Secondly, this commitment must be translated into concrete political action in the face of this pandemic, which is also a multifaceted global crisis, focusing, in my view, primarily on these major objectives: global ceasefire', reducing arms expenditure in the service of development and energy transition'. So, yes, multilateralism and diplomacy will be among the miracle cures of the "after".
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