dimanche 11 janvier 2015

Je suis Charlie... sans état d'âme.

Parler de l'attentat contre Charlie Hebdo et contre une épicerie juive sur un blog dédié à la promotion de la culture de la paix est une évidence.
Quand on défend notamment " le respect de tous les droits de l’homme,  l’égalité entre les femmes et les hommes,  la compréhension, la tolérance et la solidarité,  la communication participative et la libre-circulation de l’information et des connaissances"(A/53/243  : Déclaration et Programme d’action sur une culture de la paix), on ne peut que rejeter une telle violence. Celle-ci ne peut en aucun cas être justifiée. L'extrémisme religieux, quelle que soit sa confession, est incompatible avec des valeurs d'égalité, de justice, de liberté, de solidarité, de tolérance et de non-violence.
La mobilisation massive et spontanée des citoyens en France et à travers le monde sur le thème "Je suis Charlie" ce dernier week-end est réconfortante.
Il est particulièrement positif que, à côté de l'émotion forte et de l'empathie spontanée avec les victimes, ce soit des valeurs qui fondent notre commune humanité qui viennent en réflexions chez des millions de français, alors que le débat des derniers mois était marqué d'abord par la défense des corporatismes voire des égoïsmes.
C'est pourquoi "Je suis Charlie" sans restriction.
D'abord, parce que je fais mien les vers d'Aragon dans "La rose et le réséda" :
"Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au coeur du commun combat"
.
En effet, ce qui a été attaqué par ces attentats touche aux fondations de la "maison commune" de la République ! Pour défendre les fondations et les murs de la maison, défendre notre commune humanité, tout le monde doit retrousser les manches et se donner la main.
Ensuite, cela ne change rien aux divergences et aux oppositions sur l'aménagement de cette maison : il y a toujours ceux qui veulent réserver le 1er étage pour les riches, les autres étages pour les petits cousins et le personnel, et les combles pour les chambres de bonnes. Et il y a heureusement ceux qui veulent que tous profitent de l'eau courante, du chauffage, des toilettes à tous les étages avec de grandes baies distribuant généreusement la lumière. À nous de gérer les affrontements sur l'aménagement de la maison commune sans faire écrouler les murs et le toit !
Mais bien sûr, ne perdons pas de temps pour donner à chacun les biens communs minimaux : l'éducation, la nourriture, la lumière, l'eau, l'électricité et un confort minimum ! N'oublions pas que le nombre d'affamés sur notre planète approche toujours du milliard d'individus..
Ces événements terribles doivent aussi faire réfléchir aux rapports humains dans notre société, sur notre planète. Plus que jamais, c'est à davantage d'ouverture et de dialogue plutôt qu'à une fermeture et à un repli, que nous invite cet événement tragique.
Il faut aussi remarquer que nous n'avons pas eu affaire à des fous ou au "loup solitaire" dans la forêt qui fuit ses congénères, mais à des individus pouvant agir seuls ou en petit groupe, tout en étant connectés avec la planète monde, en étant baignés par toutes les informations, y compris les plus manipulatrices, tous les débats sociaux...
Les formes de ces attentats sont des conséquences logiques d'une évolution du monde qui développe l'individualisation, les capacités d'actions individuelles renforcées par nouveaux moyens d'information : internet, réseaux sociaux, diffusion généralisée de la télévision grâce aux paraboles et satellites.
Cette évolution est positive dans plein de domaines : initiatives humanitaires ou de solidarités individuelles, intervention citoyenne facilitée (voir les "lanceurs d'alertes") mais elle donne aussi des capacités supplémentaires aux forces destructrices, aux réseaux terroristes, aux mafias.
Nous n'avons pas à en avoir peur et adopter une attitude frileuse envers la mondialisation de l'information mais faire face avec lucidité.
L'enjeu est donc de comprendre cette individualisation des révoltes, des actions, y compris mortifères et d'y faire face dans la démocratie et le droit, en conjuguant liberté plus grande pour tous sur la planète et protection de la société humaine, de ses grandes valeurs de culture de paix, de droits humains, de tolérance et liberté. Attention aux dérives comme celles constatées aux États-Unis après le 11 septembre : Guantanamo, le Patriot Act !
Il ne sert à rien de mener des querelles de mots pour caractériser les actes odieux de ces derniers jours : fascisation, fanatisme religieux, terrorisme, mais d'agir à la fois dans le concret et dans l'immédiat, en respectant le droit et dans le moyen terme en tarissant le terreau fertile à ces haines : en réglant les conflits pourrissants depuis des années (le droit à un état pour le peuple palestinien en est un essentiel), en s'attaquant beaucoup plus résolument aux inégalités sociales sur notre planète. C'est là aujourd'hui le principal enjeu international : il n'est plus un enjeu politique ni militaire, c'est un enjeu social.
Il y a urgence si nous ne voulons pas que se produisent d'autres crimes contre Charlie et que prospèrent les divisions dans nos sociétés.




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