Août 2011 restera dans l'histoire comme le mois de la chute du colonel Khadafi, après 42 années de pouvoir et de liaisons dangereuses, d'abord avec les Soviétiques, puis les Occidentaux, en passant par de multiples et obscurs réseaux terroristes. La chute de Khadafi s'inscrit dans le "printemps arabe", la protestation populaire a été réelle dans les premières semaines, y compris à Tripoli avant que la répression ne transforme la crise en guerre civile complexe avec des enjeux tribaux, régionaux à l'intérieur du pays.
Quelles leçons tirer et surtout quelles perspectives pour ce pays demain ?
La crise libyenne illustre à la fois les évolutions prometteuses du monde et du droit international et les forces qui s'y opposent.
Depuis le génocide du Rwanda, les grandes puissances ont du inclure en 2005 le principe de "la responsabilité de protéger" les populations civiles dans les buts du Conseil de sécurité. On a vu comment la France, le Royaume-Uni et les USA se sont efforcés et ont réussi à détourner la résolution de l'ONU au bénéfice d'une opération militaire de l'OTAN, visant prioritairement le renversement du régime de Khadafi et une redistribution des cartes politiques, au lieu de l'imposition d'un simple cessez-le-feu pour empêcher le massacre de la population.
Les critiques sur l'ONU "discréditée parce que manipulée" cachent en fait largement l'impuissance du mouvement démocratique à empêcher les manoeuvres des Sarkozy, Cameron et cie, tout en promouvant une vision dynamique des Nations unies et du droit international.
En juillet dernier, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon a répondu aux pays qui exprimaient leur crainte d'un risque de manipulation du principe de "responsabilité de protéger", et notamment la question de savoir qui décide qui doit être protégé et comment. « Personne n'a le monopole de la vertu, du recul ou du jugement », a reconnu le Secrétaire général Ban Ki-moon, appelant à continuer de répondre aux préoccupations légitimes de nombreux pays face aux risques de mauvaise interprétation du concept qui irait au-delà de ce qui a été convenu en 2005. Mais « on ne peut attendre que la théorie soit perfectionnée pour commencer à répondre aux situations urgentes dans le monde », a fait valoir son Conseiller spécial, Edward Luck.
L'attitude des dirigeants de l'OTAN, leur refus de prendre en compte correctement les initiatives régionales de la Ligue arabe et de l'Union africaine ont ébranlé la future mise en oeuvre de ce nouveau concept. Cela a pesé pour que des sanctions politiques ou économiques soit adoptés à l'ONU face à la répression bestiale du régime syrien.
Aujourd'hui, la situation en Libye reste fragile : le Comité national de Transition a demandé le soutien de la communauté internationale pour la promotion d`un dialogue national, la rédaction d`une constitution, la restauration des services publics ainsi que la consolidation de l'État, le lancement d`un processus électoral, la protection des droits de l`homme, le soutien à la justice transitionnelle et le développement économique.
Qui va être au centre de ce soutien international, avec quels objectifs ? Va-t-on laisser les animateurs de la coalition de l'OTAN essayer de récupérer le "gâteau" des richesses libyennes et mettre sous protectorat le nouveau régime avec les troupes de l'OTAN ? Les déclarations arrogantes de M. Juppé, jugeant "logique" la semaine dernière que les pays ayant soutenu les rebelles soient privilégiés dans l'attribution des contrats pétroliers ne sont que des rodomontades : le patron du groupe allemand Wintershall, l'un des principaux producteurs de pétrole en Libye, M. Seele, dans un entretien publié par le journal Handelsblatt, met en garde contre une mainmise des groupes pétroliers des pays ayant participé à l'opération militaire sur les ressources libyennes. "La dernière chose dont les gens en Libye ont besoin, ce sont des entreprises qui n'ont qu'un intérêt : épuiser les ressources du pays", a-t-il dit.
Il est clair que la seule manière d'aider le peuple libyen à devenir maître de son destin est d'agir pour que les Nations unies reprennent une place centrale dans la gestion post-crise en Libye.
Le dirigeant du CNT, M. Abdel-Jalil-ci a fait part, il y a quinze jours, de sa gratitude envers les Nations Unies pour le travail effectué en Libye, et en particulier, le rôle de l'Envoyé spécial du Secrétaire général, Abdel-Elah al Khatib.
Les Nations Unies comptent jouer un rôle essentiel de coordination dans l'avenir du pays, a déclaré le 26 août, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui souhaite déployer rapidement une mission de l'ONU sur le terrain. Pour celui-ci, « Trois principes vont gouverner notre travail. Premièrement, l`appropriation nationale. Le futur de la Libye doit résolument rester entre les mains du peuple libyen », « Deuxièmement, la rapidité de la réponse. Il est essentiel que la communauté réponde quand cela est nécessaire et non pas des semaines ou des mois après », a-t-il ajouté, « Le troisième principe est une coordination efficace.», a dit Ban Ki-moon.
Jusqu'où peut aller ce rôle de l'ONU ? Ne faut-il pas exiger l'arrêt immédiat des opérations de l'OTAN, le retrait des "forces spéciales" et autres barbouzes du terrain, et, si les libyens le souhaitent et l'estiment nécessaire, une aide pour garantir la sécurité intérieure dans le droit, avec une force multinationale de Casques bleus, établie en coordination avec les organisations régionales (Ligue arabe et U.A) ?
On ne peut en rester à une simple critique (oh combien justifiée) de la diplomatie française et à une position d'attente critique envers les nouvelles structures politiques qui auront beaucoup de mal à se mettre en place dans ce pays, à la société destructurée par la politique autoritaire de Khadafi et la période de guerre en train de s'achever.
Ne pas travailler concrètement à la valorisation du rôle à jouer par les Nations unies dans cette situation post-conflit est se condamner à l'impuissance politique et aux simples déclamations idéologiques, pire, c'est laisser le terrain libre aux grandes puissances pour freiner l'évolution du droit international et continuer d'essayer de le détourner à leur profit.
5 septembre 2011
Quelles leçons tirer et surtout quelles perspectives pour ce pays demain ?
La crise libyenne illustre à la fois les évolutions prometteuses du monde et du droit international et les forces qui s'y opposent.
Depuis le génocide du Rwanda, les grandes puissances ont du inclure en 2005 le principe de "la responsabilité de protéger" les populations civiles dans les buts du Conseil de sécurité. On a vu comment la France, le Royaume-Uni et les USA se sont efforcés et ont réussi à détourner la résolution de l'ONU au bénéfice d'une opération militaire de l'OTAN, visant prioritairement le renversement du régime de Khadafi et une redistribution des cartes politiques, au lieu de l'imposition d'un simple cessez-le-feu pour empêcher le massacre de la population.
Les critiques sur l'ONU "discréditée parce que manipulée" cachent en fait largement l'impuissance du mouvement démocratique à empêcher les manoeuvres des Sarkozy, Cameron et cie, tout en promouvant une vision dynamique des Nations unies et du droit international.
En juillet dernier, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon a répondu aux pays qui exprimaient leur crainte d'un risque de manipulation du principe de "responsabilité de protéger", et notamment la question de savoir qui décide qui doit être protégé et comment. « Personne n'a le monopole de la vertu, du recul ou du jugement », a reconnu le Secrétaire général Ban Ki-moon, appelant à continuer de répondre aux préoccupations légitimes de nombreux pays face aux risques de mauvaise interprétation du concept qui irait au-delà de ce qui a été convenu en 2005. Mais « on ne peut attendre que la théorie soit perfectionnée pour commencer à répondre aux situations urgentes dans le monde », a fait valoir son Conseiller spécial, Edward Luck.
L'attitude des dirigeants de l'OTAN, leur refus de prendre en compte correctement les initiatives régionales de la Ligue arabe et de l'Union africaine ont ébranlé la future mise en oeuvre de ce nouveau concept. Cela a pesé pour que des sanctions politiques ou économiques soit adoptés à l'ONU face à la répression bestiale du régime syrien.
Aujourd'hui, la situation en Libye reste fragile : le Comité national de Transition a demandé le soutien de la communauté internationale pour la promotion d`un dialogue national, la rédaction d`une constitution, la restauration des services publics ainsi que la consolidation de l'État, le lancement d`un processus électoral, la protection des droits de l`homme, le soutien à la justice transitionnelle et le développement économique.
Qui va être au centre de ce soutien international, avec quels objectifs ? Va-t-on laisser les animateurs de la coalition de l'OTAN essayer de récupérer le "gâteau" des richesses libyennes et mettre sous protectorat le nouveau régime avec les troupes de l'OTAN ? Les déclarations arrogantes de M. Juppé, jugeant "logique" la semaine dernière que les pays ayant soutenu les rebelles soient privilégiés dans l'attribution des contrats pétroliers ne sont que des rodomontades : le patron du groupe allemand Wintershall, l'un des principaux producteurs de pétrole en Libye, M. Seele, dans un entretien publié par le journal Handelsblatt, met en garde contre une mainmise des groupes pétroliers des pays ayant participé à l'opération militaire sur les ressources libyennes. "La dernière chose dont les gens en Libye ont besoin, ce sont des entreprises qui n'ont qu'un intérêt : épuiser les ressources du pays", a-t-il dit.
Il est clair que la seule manière d'aider le peuple libyen à devenir maître de son destin est d'agir pour que les Nations unies reprennent une place centrale dans la gestion post-crise en Libye.
Le dirigeant du CNT, M. Abdel-Jalil-ci a fait part, il y a quinze jours, de sa gratitude envers les Nations Unies pour le travail effectué en Libye, et en particulier, le rôle de l'Envoyé spécial du Secrétaire général, Abdel-Elah al Khatib.
Les Nations Unies comptent jouer un rôle essentiel de coordination dans l'avenir du pays, a déclaré le 26 août, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui souhaite déployer rapidement une mission de l'ONU sur le terrain. Pour celui-ci, « Trois principes vont gouverner notre travail. Premièrement, l`appropriation nationale. Le futur de la Libye doit résolument rester entre les mains du peuple libyen », « Deuxièmement, la rapidité de la réponse. Il est essentiel que la communauté réponde quand cela est nécessaire et non pas des semaines ou des mois après », a-t-il ajouté, « Le troisième principe est une coordination efficace.», a dit Ban Ki-moon.
Jusqu'où peut aller ce rôle de l'ONU ? Ne faut-il pas exiger l'arrêt immédiat des opérations de l'OTAN, le retrait des "forces spéciales" et autres barbouzes du terrain, et, si les libyens le souhaitent et l'estiment nécessaire, une aide pour garantir la sécurité intérieure dans le droit, avec une force multinationale de Casques bleus, établie en coordination avec les organisations régionales (Ligue arabe et U.A) ?
On ne peut en rester à une simple critique (oh combien justifiée) de la diplomatie française et à une position d'attente critique envers les nouvelles structures politiques qui auront beaucoup de mal à se mettre en place dans ce pays, à la société destructurée par la politique autoritaire de Khadafi et la période de guerre en train de s'achever.
Ne pas travailler concrètement à la valorisation du rôle à jouer par les Nations unies dans cette situation post-conflit est se condamner à l'impuissance politique et aux simples déclamations idéologiques, pire, c'est laisser le terrain libre aux grandes puissances pour freiner l'évolution du droit international et continuer d'essayer de le détourner à leur profit.
5 septembre 2011
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