Ce dimanche 29 août est depuis l'année dernière "Journée internationale contre les essais nucléaires". Cette date a été choisie par la 64e session de l'Assemblée générale de l'ONU, en référence au 29 août 1949 lorsque l'Union soviétique imita les Etats-Unis et effectua son premier test atomique, lançant la course aux armements nucléaires. Le site de cette explosion à Semipalatinsk, dans l'actuel Kazakhstan, a été fermé symboliquement le 29 août 1991 par le président kazakh Noursoultan Nazarbaïev. 450 bombes y ont été testées entre 1949 et 1991.
Le traité qui interdit les explosions nucléaires à des fins civiles ou militaires a été conclu en septembre 1996. Il a été signé depuis par 182 pays, dont les cinq principales puissances nucléaires, et ratifié par 153 d'entre eux. Il n'est toujours pas entré en vigueur car il n'a été ratifié que par 35 des 44 Etats qui doivent le faire pour qu'il entre en vigueur. Parmi les neuf Etats dont la ratification est indispensable, la Corée du Nord, l'Inde et le Pakistan n'ont pas signé le traité et ont tous les trois mené des essais nucléaires depuis 1996. Les six autres pays (Chine, Egypte, Etats-Unis, Indonésie, Iran, Israël) ont signé le texte mais sans le ratifier.
Le président américain Barack Obama a indiqué que Washington était prêt à ratifier le traité. Mais il souhaite que le Sénat américain se penche d'abord sur le Traité de réduction des armes stratégiques START avant de s'y attaquer.
La ratification de ce traité (TICEN en français ou CTBT en anglais) par les États-Unis serait évidemment un signal très fort pour le processus de désarmement nucléaire. En même temps, le système de ratification choisi pour ce Traité permet à un seul pays des "44" de jouer un rôle de blocage ! Pour que cette ratification fonctionne, il aurait fallu que le climat favorable au désarmement en 1995 et un peu en 1996 continue et permette alors de créer une poussée suffisante envers ces 44 pays : cela ne fut pas le cas. L'Inde avait fait savoir alors qu'elle ne ratifierait pas et le Sénat US refusa de suivre Bill Clinton qui souhaitait la ratification.
Certes, ce traité ne traite pas de phénomènes, non classés officiellement comme essais nucléaires, comme les essais de très faible puissance dit "sous-critiques" ou des recherches en laboratoire (laser Mégajoule au Barp, près de Bordeaux), qui sont accusés de pouvoir poursuivre les expériences sur les modernisations nucléaires. Le phénomène politique intéressant à observer est que ce Traité, bien qu'il ne soit pas encore entré en vigueur, a pu démarrer (avec les pays ayant ratifié) certaines dispositions : un organisme de suivi a été créé à Vienne, l'Organisation du traité d'interdiction des essais nucléaires (CTBTO) et surtout un réseau de stations de contrôle (sismographes, stations infrasounds, analyses de particules radioactives dans l'air) réparties sur toute la planète, a été établi qui envoie les informations prélevées au siège de l'Organisation. Ce dispositif une fois terminé serait très précieux et peut servir de complément et d'exemple dans le cadre d'une Convention générale d'interdiction des armes nucléaires.
Cette première Journée internationale contre les essais nucléaires est célébrée alors que Ban Ki-moon a été le premier Secrétaire général de l'ONU à participer à la cérémonie annuelle de commémoration du bombardement atomique des villes japonaises d'Hiroshima et de Nagasaki en 1945.
Celui-ci, dans un message délivré à l'occasion de la Journée, a appelé à l'entrée en vigueur du Traité : « J'ai demandé que la date butoir pour la réalisation de cet objectif soit 2012. En attendant l'entrée en vigueur du Traité, j'invite instamment l'ensemble des États à appliquer un moratoire sur toutes les explosions nucléaires », a-t-il ajouté.
Il s'agit de sa part d'un nouvel engagement personnel fort ; sera-t-il écouté ? L'issue est incertaine car il n'y a eu jusqu'à présent que peu de mobilisation de la société civile, des ONG et des réseaux de pays antinucléaires comme les Non-alignés sur cet enjeu. Les Conférences préparatoire et d'examen de ce Traité n'ont pas vu la même mobilisation que celles qui accompagnent le processus du TNP. Mais, justement, le fait que la nécessité de l'entrée en vigueur du TICEN/CTBT figure dans le document adopté par la Conférence du TNP à New-York en mai dernier peut avoir un effet positif pour augmenter la pression politique sur les neuf pays qui "traînent les pieds" pour ratifier le Traité.
Daniel Durand - 29 août 2010
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