Comme chaque année, la dernière semaine d'août, s'est tenue la rencontre de tous les ambassadeurs, avec les discours du Président de la République, du Premier ministre et du Ministre des Affaires étrangères qui, souvent, sont l'occasion d'un point de la diplomatie française.
Cette année, plusieurs observateurs, à l'instar de Pascal Boniface sur son blog (http://www.affaires-strategiques.info/), ont noté le ton défensif des discours.
Nicolas Sarkozy et la diplomatie française se trouvent en difficulté sur la scène internationale : sur le terrain habituellement privilégié de la défense des droits de l'homme avec les expulsions violentes de roms et la condamnation du Pape, d'organismes onusiens, sur la finalité de la présence militaire française en Afghanistan car la solution essentiellement militaire choisie par les États-Unis de Bush et non-encore modifiée par Obama, montre ses limites et son échec probable, sur la détente et le désarmement, puisque la dsplomatie sarkozienne n'a pas su anticiper le virage de la politique US en matière de désarmement nucléaire. On a constaté à New-York en mai dernier l'isolement relatif des déplomates français.
De ce fait, la France se trouve rejetée au rang de puissance dont la présence et l'efficacité sont remises en cause. Cela explique que tant Nicolas Sarkozy que Bernard Kouchner ont laissé percé leur crainte devant la montée des pays émergents : rôle de la Chine lors de la crise monétaire, création du bloc de pays dit "BRIC" (Brésil, Russie, Inde, Chine), agacement devant l'initiative Brésil-Turquie dans la crise iranienne en mai, etc...
Le principal but du discours de Nicolas Sarkozy a donc consisté à chercher un terrain où la présence française pourrait paraître conserver une certaine utilité. L'Europe est une de ces pistes puisqu'avec "500 millions de citoyens et une puissance économique qui représente près de 30 % du PIB mondial, plus de 35 % du total mondial des investissements directs à l’étranger et même près de 60 % du total de l’aide publique au développement", l’Union européenne "a en mains les cartes nécessaires pour s’imposer comme une puissance économique globale". Les dirigeant français se sont félicités de l'entente franco-allemande : jusqu'où ira celle-ci ? On peut être sceptique tant les buts visés sont différents.
Le Président de la République a enfourché un nouveau cheval de bataille avec le G20. En effet, le 12 novembre prochain, la France prendra la présidence du G20 pour un an, et le 1er janvier prochain, celle du G8. En rappelant que le G20 avait été créé sur proposition française, Nicolas Sarkozy dresse un tableau flatteur de l'action de celui-ci lors de ces derniers mois de crise. Il lance l'idée de faire du G20 le fer de lance d'une future gouvernance mondiale économique, s'attaquant au chantier "de la réforme du système monétaire international", se dotant d'une structure permanente. On a le sentiment que Nicolas Sarkozy, mis en difficulté dans les arènes diplomatiques classiques de l'ONU cherche à rebondir, y compris hors du système onusien...
Ce sentiment est renforcé par l'attaque en règle menée par Bernard Kouchner dans son intervention contre le système des Nations Unies : "L’ONU rassemble mal, et la réforme de l’ONU piétine". Pour lui, "la crise que traverse l’ONU tient d’abord à une remise en cause de la légitimité mais aussi de l’efficacité de ses institutions. Pour certains, l’organisation n’est plus représentative du monde et de son évolution. Pour d’autres, une suspicion générale pèse sur son efficacité."
Alors, oui, réformer le système du multilatéralisme internationale mais deux voies s'ouvrent. Soit on s'appuie sur ses principes de base : égalité des pays, transparence des décisions et des fonctionnements ; dans ce cadre, on peut faire évoluer le Conseil de sécurité, créer parallèllement un Conseil de sécurité économique, s'appuyant sur l'expérience du G20. Soit on contourne les institutions actuelles pour en créer d'autres mais sans respecter ni égalité entre pays, ni transparence des décisions (c'est la situation du G8 aujourd'hui, mais aussi de l'OMC, du FMI et la BM) et on renforce les dominations (à géométrie variable) des pays les plus puissants, et demain on crée de nouvelles frustrations et de nouveaux risques d'affrontement. La France a peu à gagner dans cette voie, car elle finirait de brouiller encore plus son image de pays démocratique et ouvert...
Daniel Durand 7 septembre 2010
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