Il y a des télescopages de calendrier étranges. Ce lundi et ce mardi, à Genève, pendant la Prepcom du TNP, la quasi unanimité des intervenants ont insisté pour dire que l'accord réalisé sur le programme nucléaire iranien était un bon exemple de négociation politique. Le soutien à cet accord de Vienne sur le nucléaire iranien ou "plan d'action conjoint" a été réaffirmé, non seulement par la France, mais aussi par le représentant de l'Union européenne. La Chine a préparé avec la Russie un projet de déclaration commune visant à exprimer le soutien de la conférence à ce plan. Pour la Russie, l'accord conclu entre les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, plus l'Union européenne et l'Iran, est "une combinaison unique de mesures développées dans le cadre du Conseil de sécurité de l'ONU et des mécanismes de l'AIEA, qui a fait ses preuves". Seul le représentant des États-Unis avait fait des réserves lundi. L'annonce, ce mardi à Washington, des présidents Trump et Macron de "travailler à un nouvel accord plus large avec l'Iran" qui viserait à bloquer toute activité nucléaire iranienne jusqu’en 2025, empêcher à plus long terme toute activité nucléaire, stopper les activités balistiques de l’Iran et créer les conditions d’une stabilité politique dans la région, risque d'être le point central des discussions dans les couloirs à Genève ce mercredi.
L'annonce unilatérale par deux chefs d'État de modifier un accord alors que celui-ci n'avait pu aboutir, qu'après de longues discussions avec toutes les parties intéressées, en prenant en compte toutes leurs préoccupations, pose un énorme problème diplomatique ! La France vient ainsi de se repositionner en "donneuse de leçons", aux côtés d'un homme dont les humeurs fantasques font tressaillir jusqu'à l'ancien chef du FBI ! Peu d'observateurs penseront que le Président français a fait changer d'avis Donald Trump, beaucoup estimeront que les concessions sont du côté de M. Macron.
Qu'espère celui-ci en échange ? Pense-t-il pouvoir jouer de la proximité affichée avec le président américain pour gagner en stature internationale, voire infléchir les positions US sur certains dossiers ?
On ne peut s'empêcher de penser à un autre jeune chef de gouvernement, brillant, à l'avenir prometteur, qui, en 2002 et 2003, avait choisi de s'aligner sur le président Bush, en devenir le "meilleur ami" pour infléchir sa politique, disait-il. Il n'a pu empêcher alors les États-Unis d'envahir l'Irak en 2003 et le brillant Tony Blair, puisque je parle de lui, est devenu, pour une partie de l'opinion publique britannique, le "caniche de Bush".
Je ne pense pas que se joue aujourd'hui un "2003 à l'envers", bien que le bombardement "occidental" sur la Syrie ait déjà suscité cette référence. Mais il est clair que Emmanuel Macron n'a pas envoyé un bon signal à la communauté internationale. L'accord de Vienne sur l'Iran était un bon accord, un exemple d'accord politique ; en le fragilisant sous prétexte "d'élargissement", on risque de fragiliser toutes les démarches et négociations politiques, et valoriser à l'inverse les attitudes unilatérales et interventionnistes ! Ce mardi, à Genève, on a senti dans l'intervention du représentant russe une colère, de moins en moins contenue, face au pressing des occidentaux sur tous les aspects de la politique russe. Cela risque d'empirer demain, les relations internationales n'y gagneront rien.
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