À la veille de l'ouverture de son débat général, dont le thème est cette année le règlement des différends par des moyens pacifiques, l'Assemblée générale des Nations Unies a réaffirmé lundi dans une déclaration adoptée par consensus « son attachement à l'état de droit et son importance fondamentale pour le dialogue politique et la coopération entre tous ses États Membres ». Même si cela peut paraître surprenant, c'est la première fois que l'Assemblée discute de la question de l'état de droit à un tel niveau. Les Nations unies sont en effet confrontées à un problème : même si elles disposent d'un nombre impressionnant de textes juridiques internationaux, le véritable défi est de faire entrer en vigueur les cadres juridiques existants. C'est seulement dans cette perspective que la réflexion menée depuis la dernière session de l'Assemblée générale des Nations Unies sur le règlement des différends par des moyens pacifiques, la médiation et la prévention des conflits pourra trouver sa pleine efficacité.
La réflexion de fond a cependant progressé parmi les États comme en a témoigné également le 12 septembre dernier la résolution adoptée par l'Assemblée générale sur la sécurité humaine. Cette résolution marque une avancée dans la compréhension commune de cette notion qui appelle des réponses axées sur l’être humain, « globales, adaptées au contexte et centrées sur la prévention ». La résolution rappelle que "la sécurité humaine tient compte des liens réciproques entre paix, développement et droits de l’homme et accorde la même importance aux droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels".
Elle permet de lever des ambiguïtés en précisant que la notion de sécurité humaine se distingue du principe de la « responsabilité de protéger » et de son application, que son application relève d'abord de la responsabilité de chaque État national et ne saurait être imposée par la force.
Là encore, on pourrait objecter qu'il s'agit de paroles et de bonnes intentions, comme en témoigne le fait que certains pays ont adopté ces résolutions tout en faisant montre par ailleurs de scepticisme pour leur efficacité.
En même temps, l'actualité de ces dernières semaines (Syrie, Mali) et de l'année 2011 (Lybie) montre qu'il y a besoin de continuer à préciser les cadres de l'action internationale pour éviter que les bonnes intentions ne servent qu'à dissimuler les manoeuvres stratégiques de certaines puissances.
Pour la Lybie, le Conseil de sécurité avait adopté en mars 2011 la résolution 1973 dont le but était simplement de protéger les populations civiles. On sait comment son contenu trop flou a pu être manipulé et instrumentalisé par MM Cameron et Sarkozy pour une intervention militaire, avec l'utilisation de l'OTAN, visant d'abord à un changement de régime par la force, avec des visées en arrière-plan économico-stratégiques. Cette dérive du droit international a empêché toute intervention humanitaire efficace en Syrie, la Chine et la Russie, furieux d'avoir été dupés dans la crise lybienne, ayant bloqué toute solution. On peut d'ailleurs se poser des questions sur la pertinence de la diplomatie française y compris après l'élection présidentielle. MM Hollande et Fabius ont-ils eu raison de ne pas se démarquer dès le début de la diplomatie sarkozienne, y compris en avançant comme quasi-préalable, le départ de Bachar el-Assad ? Depuis le mois d'août, l'impasse diplomatique évidente dans laquelle on se trouve a, semble-t-il, amené le président Hollande à recadrer plus le discours, et ce d'abord en réaffirmant le soutien de la France à la prééminence des Nations unies et le refus de toute aventure militaire en dehors du cadre onusien (voir mon article précédent). De même, M. Fabius, dans ses derniers discours (Conférence inaugurale de l’Ecole des Affaires internationales le 6 septembre), a inversé apparemment les priorités par rapport aux discours de juin dernier : "Face à l’urgence, la France se mobilise, en apportant d’abord une aide humanitaire. Nous développons notre assistance aux zones libérées, pour permettre aux résistants de renforcer leurs positions. La fin des violences passe par une solution politique – départ de Bachar el-Assad, mise en place d’un gouvernement de transition, (...)".
La France a tout à gagner, si elle veut devenir "une puissance d'influence" comme l'a déclaré le ministre, à s'inscrire encore plus dans le renforcement du droit international et des des Nations unies, de leur réforme et de leur efficacité. Il semble que dans la crise malienne, l'approche soit plus prudente (le spectre de la Françafrique rôde toujours) et mette en avant et les États de la région et le soutien onusien. Les suites des déclarations et débats lors des journées d'ouverture de la nouvelle session de l'ONU cette semaine nous en apprendront plus...
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