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lundi 22 octobre 2018

Cent ans après 1918 : quelles leçons ? I/III - L'échec de la paix dans l'entre-deux guerres

Le centenaire de la fin de la 1ère Guerre mondiale 1914-1918 suscite nombre de recherches et de colloques et interroge un public large, au-delà des historiens et spécialistes. Le président de la République française organise même un "Forum de Paris sur la paix" le 11 novembre prochain. Des questions nous interpellent. Pourquoi la paix n'a-t-elle pas tenu après 1918, alors que tout le monde annonçait la "der des der" ? Paradoxalement, pourquoi sommes-nous toujours en paix, 73 ans après la fin du second conflit mondial en 1945 ? Enfin, les deux premières décennies de ce XXIe siècle, avec la recrudescence des tensions, la hausse brutale des crédits militaires et des ventes d'armes, la crise économique mondiale, ne rappellent-elles pas cette "montée à la guerre" de la fin des années 30 ?
Je livrerai  quelques réflexions sur ces thèmes dans trois articles consécutifs.

I/III - L'échec de la paix dans l'entre-deux guerres

Au lendemain de la fin de l'horrible boucherie de la 1ère Guerre mondiale, le rejet de la guerre est général dans l'opinion publique française. Il s'est cristallisé dès 1916 avec la publication du livre-choc,  le "Feu" de Henri Barbusse, la création en 1917 de l'ARAC (Association républicaine des anciens combattants) dont le slogan central sera le fameux "guerre à la guerre".
Cet attachement à la paix est, en même temps, un sentiment quasiment unanime en France.
Cela marque une différence avec les décennies de l'avant-guerre, où on trouvait dans une partie de la classe politique l'éloge des "vertus la guerre", estimée bonne pour tremper les caractères, voire forger une nation et une communauté de destin.
Ce rejet quasi unanime de la guerre ne signifie pas pour autant que la France est devenue globalement pacifiste car il se fractionne vite en plusieurs courants dès 1920  : le "plus jamais ça" des anciens combattants dont l'Union fédérale, créée notamment par René Cassin (1887-1976), joue un rôle central dans l'opinion, le courant du pacifisme par le droit qui s'exprime par le soutien prioritaire à la création de la SDN (la Société des nations), un courant anti-militariste et anti-impérialiste communiste, un courant pacifiste radical très fort dans la minorité libertaire de la CGT ainsi que dans le Syndicat des instituteurs.
La limite au développement des courants pour la paix se trouve certainement dans le fait qu'il n'y a pas d'élément fédérateur durable, permettant de surmonter les divergences. Le soutien à la Société des nations joue en partie ce rôle jusqu'en 1930 après la signature du traité de Locarno en 1925, qui semble régler la sécurité collective des pays à l'ouest de l'Europe. On parle positivement de "l'esprit de Locarno" et sa cheville ouvrière, Aristide Briand est appelée le "pélerin de la paix".
Mais l'impuissance croissante de la SDN face à certains conflits comme l'Éthiopie et son manque d'universalité (notamment l'absence des États-Unis) l'empêche de jouer ce rôle de pivot de la paix.
La création de mouvements d'intellectuels pour la paix comme le "Comité d'action contre la guerre et le fascisme" en 1932 et 1933, appelé mouvement Amsterdam-Pleyel, pour la création duquel duquel Henri Barbusse joua un grand rôle, essaie de mobiliser les consciences progressistes en France. Il sera un des creusets du futur "Front populaire pour la pain et la liberté" dès juillet 1935.
Mais le montée du fascisme transforme la nature du débat, après 1935 :  fut-il donner la priorité à la lutte anti-fasciste ou à la recherche de la paix ? Ces débats pèsent sur les attitudes politiques qui s'opposent : soutien ou non aux Républicains espagnols lors de la guerre d'Espagne, contre le coup de force de Franco, soutien ou non aux accords de Munich et à la complaisance devant les visées hitlériennes...
Cela explique que dès 1938, les défenseurs de la paix soient désunis et restent sidérés en 1939 devant l'accord Hitler - Staline.
Lorsque la 2e guerre mondiale prend fin en 1945, la situation du monde change radicalement. Elle est maintenant structurée par les deux camps vainqueurs mais opposés : les USA et l'URSS. Il faut tirer les leçons de l'échec de la Société des nations : la Charte créant l'ONU (Organisation des nations unies) donne des moyens d'agir à son Conseil de sécurité. L'organisation regroupe tous les grands pays du monde et continue son universalisation dans le cadre de la décolonisation, elle multiplie la création d'agences qui couvrent tous les domaines de la vie internationale. Une nouvelle période s'ouvre...

dimanche 17 juillet 2011

14 juillet : ouvrir un débat national sérieux.

Peut-on toucher au défilé militaire du 14 juillet ? Évitons les polémiques politiciennes et revenons sur les faits.
Le 14 juillet marque la date de la prise de la prison de la Bastille, l'aspiration à la liberté du peuple de Paris, le début de la révolution française, l'élaboration de la Déclaration des Droits de l'homme, des valeurs républicaines de liberté, égalité et fraternité.
Sa première commémoration, le 14 juillet 1790, est marquée partout par des fêtes civiles et citoyennes, les "Fêtes de la Fédération" qui marquent l'unité nationale autour de la Révolution française;.
Ce n'est qu'en 1880 que la IIIe République institue le 14 juillet comme Fête nationale avec un défilé militaire, dix ans après la perte de l'Alsace et la Lorraine. Jusqu'à la Guerre de 1914-18, ces défilés porteront un contenu nationaliste : "nous reprendrons l'Alsace et la Lorraine".
Le 14 Juillet ne prendra une dimension d'union nationale qu'en 1936, après le Front populaire et après la Libération, où les combattants de la Résistance vont se fondre largement dans la nouvelle armée française.
Les années de guerres coloniales contre l'Indochine et l'Algérie n'ont pas contribué à rapprocher le peuple français et son armée. Sous la Ve République, De Gaulle et ses successeurs font du défilé du 14 juillet un moment de démonstration de la force nucléaire française, assimilée à une nouvelle indépendance nationale, une fierté nationale sans doute partagée par une majorité de l'opinion.
Aujourd'hui, les années 2000 sont marquées par deux changements : la fin de la Guerre froide dans le monde et la fin du service militaire en France.
La place grandissante du droit international conduit à ce que la présence militaire française s'inscrive de plus en plus exclusivement dans le cadre des résolutions des Nations unies (même si souvent leur interprétation est pervertie et outrepassée comme aujourd'hui en Afghanistan et en Libye). La mission des forces militaires françaises évolue de plus plus de la défense d'un territoire national (dont les limites se transforment et s'européanisent) à des missions de "police internationale" au service des lois d'une société en phase de mondialisation lente.
Dans le même temps, le service militaire national, la conscription, a été supprimé et remplacé par une professionnalisation des armées. Ce sont donc des professionnels, des sortes de "gendarmes internationaux" qui remplissent les missions confiées par le gouvernement français sur des théâtres d'opérations extérieures (OPEX), théoriquement au service du droit international, en recevant à juste titre des salaires majorés (le plus souvent triplés) à la mesure du sacrifice éventuel de leur vie, qui leur est demandé. Cette condition mérite évidemment le respect et la reconnaissance de tous. Ce n'est pas sans évoquer d'ailleurs le cas d'autres serviteurs de la collectivité comme les pompiers par exemple.
Ces grands changements du monde et de notre société imposent de réfléchir à la manière dont notre société, les citoyens/citoyennes peuvent marquer l'attachement, le soutien aux valeurs traditionnelles de liberté, justice, égalité de la République française, à de nouvelles valeurs à promouvoir comme la défense de la paix dans le monde, et plus encore, la promotion d'une nouvelle culture de paix, de "vivre ensemble".
Comment le faire ? Peut-on le réduire à un défilé de troupes militaires, une démonstration de matériel militaire (dont le coût d'ailleurs est de plus en plus largement critiqué) ? Est-ce ainsi que nous conduirons les jeunes françaises et français à aimer les valeurs de la République (voir le débat sur la Marseillaise) ?
La tradition portée par le 14 juillet et la prise de la Bastille est d'abord citoyenne. La "tradition" du défilé militaire français a été tardive et marquée par une époque donnée. Beaucoup de grands pays démocratiques n'organisent pas de parades militaires (États-Unis, Royaume-Uni) et ne sont pas moins attachés à leurs valeurs nationales et à leur armée, lorsque cela est nécessaire.
Peu importe l'opinion que chacune peut avoir sur l'intervention de Mme Joly, sur sa forme ou son opportunité. Elle pose une question réelle qui mérite mieux que les propos affligeants de M. Fillon, bien loin des valeurs républicaines qu'il prétend défendre, ou des réponses convenues, manquant singulièrement de hauteur de vue, de plusieurs leaders de l'opposition.
Les dirigeants politiques français se grandiraient, hors de toute surenchère électorale, en ouvrant un débat national sérieux, en créant une commission pour l'animer pour examiner, à la lumière des transformations du monde, des évolutions de notre société, les moyens de réaffirmer, lors de chaque 14 juillet, les valeurs républicaines de liberté, d'égalité et fraternité, les aspirations à une nouvelle culture de paix, de "vivre ensemble" de notre quartier à la planète. C'est cette démarche citoyenne qui permettrait d'irriguer encore plus largement la société française de ces valeurs, qui permettrait à la jeunesse de construire ses repères, de soutenir tous les moyens de les promouvoir et de les défendre si besoin était.
17 juillet 2011