mardi 5 octobre 2010

À l'Assemblée générale de l'ONU : multilatéralisme, désarmement et développement

L'Assemblée générale de l'ONU a consacré trois jours (du 20 au 22 septembre) en séance plénière à la discussion sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) visant notamment à réduire de moitié la pauvreté dans le monde, puis huit jours (du 23 au 30 septembre) à son débat général. Les débats ont vu une forte participation des représentants des États membres puisqu'au total, 139 chefs d'États ou de gouvernements ont participé à ces séances d'ouverture
Les questions du développement ont donc occupé une large place, les responsables de l'ONu (voir un porte-parole, M. Robert C. Orr) se sont déclarés plutôt satisfaits que les États Membres, bien que « condamnés à se serrer la ceinture » au niveau national, ont néanmoins pris des engagements significatifs en matière d’aide au développement. Pour eux, « ce Sommet de l’Assemblée générale a été plus qu’encourageant non seulement en raison du niveau de la participation à ses travaux, mais aussi en raison de la quantité des engagements qui y ont été déclarés et surtout de l’apparition de nouveaux donateurs ». Parmi les nouveaux engagements, M. Orr a salué la création d’un fonds d’un milliard de dollars par l’Union européenne (UE), destiné à aider les pays les plus pauvres à atteindre les OMD, et a relevé que la Chine s’est engagée à exempter de droit d’entrée (taxes douanières) un plus grand nombre de produits provenant des pays les moins avancés (PMA). Il a également cité l’engagement du Japon à consacrer 3,5 milliards de dollars sur cinq ans au secteur de l’éducation, alors que le Royaume-Uni a décidé de tripler son aide à la lutte contre le paludisme, pour la porter à 500 millions de livres sterlings d’ici à 2014. En dehors du soutien de la Fondation Bill et Melinda Gates, qui a offert 1,5 milliard de dollars, d’autres fondations s’engagent pour la première fois à contribuer aux efforts destinés à la réalisation des OMD.
Reste que, si l'apparition de nouveaux donateurs est positive, peu de pays ont annoncé le relèvement de leur aide au développement pour la porter au 0,7 % du PNB recommandés ! Le scandale du montant scandaleux des dépenses militaires mondiales (1500 Mds de $) a plané en arrière-plan... L'intervention du Président d'Haïti, M. Préval, a pointé cette contradiction. Pour ce qui est de la réalisation des OMD, M. Préval s’est demandé ce qu’il faut dire "des milliers de milliards de dollars engloutis par des guerres depuis 10 ans, des budgets de défense qui chaque année dépassent de loin ce qu’il faudrait pour atteindre les OMD, des incalculables richesses volatilisées dans la spéculation, dans l’arrogante suprématie de l’économie virtuelle, de la baisse continue de l’aide publique au développement qui ne représente plus que le tiers des subventions agricoles".
Après la discussion sur les objectifs du Millénaire pour le Développement, le thème de discussion de l'Assemblée générale était  la "gouvernance mondiale". Des nombreuses interventions sur ce sujet, je tire deux enseignements.
Une majorité des intervenants ont plaidé pour un renforcement du rôle des Nations unies dans cette gouvernance mondiale. Un certain nombre ont même exprimé leur inquiétude de voir se développer des structures parallèles comme le G20, qui pourrait s'auto-attribuer des compétences qui sont celles du Conseil de sécurité ou d'autres institutions onusiennes. Le Président de l'Assemblée, le suisse Prosper Deiss, a repris à son compte cette préoccupation, en soulignant que si le G-20 est « une réalité incontournable », il est important d’articuler légitimité et efficacité. "Il faut améliorer les mécanismes d’information, de consultation et de coopération entre l’ONU et les autres acteurs de la gouvernance mondiale". Le Président a dit son intention d’établir un dialogue informel avant et après les réunions du G-20 avec le Secrétaire général et le pays hôte du G-20.
Le deuxième enseignement est que, si la majorité des États ont redit leur attachement au multilatéralisme et au rôle central de l'ONU, beaucoup ont souligné leur insatisfaction sur le retard pris à réformer la composition et le fonctionnement du Conseil de Sécurité, notamment sur l'octroi d'un siège permanent aux pays émergents (Inde, Brésil, et pays africains). Est venue également la question de la future représentation de l'Union Européenne en tant qu'entité particulière, du fait de la modification apportée dans le Traité de Lisbonne, qui lui donne une personnalité juridique indépendante sur le plan international.
Développement, réforme de l'ONU, le troisème sujet abordé tout aussi largement, et ce n'est pas très courant, a été le désarmement nucléaire. Un nombre importants de dirigeants sont intervenus pour se féliciter des progrès intervenus cette année avec l'accord START américano-russe et la conclusion positive de la Conférence d'examen du TNP et pour souhaiter que se poursuive le processus pour construire un monde sans armes nucléaires.
À titre d'exmple, on peut relever que 26 pays du continent européeen ont évoqué l'importance du désarmement nucléaire et conventionnel dans leurs interventions, avec un contenu très positif dans les interventions (autrichienne, allemande, notamment). Tous les grands pays euroépens sont intervenus sur ce thème, sauf le représentant des Pays-Bas et le représentant de la France, M. Kouchner (rappelons que celui-ci n'était pas présent à la réunion de haut-niveau consacrée à la relance de la Conférence du Désarmement le 24 septembre).
Certes, comme de toute réunion générale, peu de choses concrètes sont sorties de ces dix jours de réunion mais, ces débats ont montré qu'existait actuellement une dynamique plutôt positive sur les thèmes évoqués qui ne peut que favoriser des initiatives politiques plus concrètes. Comme l'ont souligné plusieurs intervenants, un test à venir sera la tenue ou non d'une réunion internationale en 2012 sur une zone dénucléarisée au Proche-Orient.

Daniel Durand - 5 octobre 2010




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