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mardi 1 mai 2012

Vienne 2012 : un climat positif (3)


Ce lundi 30 avril s'est ouverte la séance plénière officielle du Comité préparatoire à la conférence d'examen du TNP de 2015 sous la présidence de l'ambassadeur d'Australie Peter Woolcott.
Cette séance d'ouverture n'apporte pas en général de grandes nouveautés mais permet aux représentants des états d'afficher une "posture" et donne une indication du climat général dans lequel se déroulera la Conférence. Cette réunion de 2012 s'annonce plutôt sereine même si des discussions politiques serrées auront lieu au fil des séances suivantes.
Tous les intervenants ont confirmé qu'ils jugeaient positivement les résultats de la conférence de 2010 à New-York et son "plan d'action" adopté par consensus. Plusieurs délégations ont relevé que, pour la première fois de l'histoire du TNP, les trois "piliers" du TNP (désarmement, non-prolifération, usage pacifique de l'énergie atomique) figuraient également dans le texte final. Un autre élément positif relevé par tous est la décision de travailler à une zone sans armes de destruction massive au Moyen-Orient.
L'ambassadrice des USA, Mme Susan F. Burk, dans une déclaration lyrique, a souligné que s'était dégagée en 2010 l'expression d'un "multilatéralisme positif et constructif"... Elle est revenue sur les déclarations du Président Obama pour un monde sans armes nucléaires et a rappelé que le TNP était le seul accord international ayant un volet sur le désarmement nucléaire. On peut penser que ce discours était d'autant plus lyrique que l'administration Obama à six mois de l'élection présidentielle n'a pas de proposition concrète à présenter... Mais le ton positif de Mme Burk crée un climat bien différent de la conférence de 2005 lorsque le représentant américain, M. John Bolton, déclarait qu'il n'y avait pas de pilier de désarmement dans le TNP !
Derrière l'apparent consensus sur les résultats de 2010 ont pointé malgré tout les insatisfactions de nombreux pays sur la nécessité de ne pas se contenter de déclarations ou de "plan d'action" mais de les appliquer concrètement. L'ambassadeur d'Égypte, M. Fathalla, qui parlait au nom des pays non alignés, l'a exprimé clairement et demandé aux puissances nucléaires des preuves concrètes de leur "engagement sans équivoque" pris en 2000 et renouvelé en 2010 d'aller vers un monde sans armes nucléaires. Il a insisté sur l'urgence de définir un cadre légal pour que les pays non-nucléaires reçoivent des garanties de sécurité au travers d'un accord légal, qu'ils ne soient plus menacés d'attaques nucléaires par les pays possesseurs. Cette exigence a été reprise par de nombreuses délégations africaines ou asiatiques.
En début de séance, la nouvelle responsable du désarmement aux Nations unies, Mme Angela Kane, avait rappelé les cinq propositions de désarmement nucléaire du Secrétaire général Ban Ki-moon, dont la négociation d'une Convention d'abolition de ces armes. Elle a aussi rappelé que dans le texte adopté en 2010, figurait la reconnaissance des conséquences humanitaires catastrophiques de l'usage des armes nucléaires et l'affirmation de "la nécessité pour tous les états à tout moment de se conformer avec la loi internationale, incluant le droit humanitaire international".
Cette notion de dimension humanitaire du désarmement nucléaire a été reprise par l'ambassadeur suisse dans son intervention : on annonce d'ailleurs que mercredi prochain, une quinzaine de pays vont déposer une résolution sur cette question.
L'ambassadeur de France, M. Jean-Hugues Simon-Michel, a réaffirmé que la France soutenait le plan d'action de la conférence de 2010. Il n'a pas jugé bon de rappeler, contrairement aux ambassadeurs US, britannique et chinois, que la politique française s'inscrivait dans la perspective d'un monde sans armes nucléaires, même s'il a déclaré que notre pays "n'éluderait pas ses responsabilités particulières" de puissance nucléaire. Pour illustrer les efforts faits, il a annoncé que la France avait "atteint l'objectif fixé en 2008 par le Président de la République de réduire d'un tiers la composante aérienne de notre force de dissuasion".
Qu'est-ce que cela signifie ? Il y a eu une réorganisation des trois escadrons d'avions porteurs de missiles à têtes nucléaires qui sont désormais deux : un à Istres et un à Saint-Dizier (au lieu de un à Istres et deux à Luxeuil-les-Bains).
Plusieurs experts ont fait remarquer que cette réorganisation s'accompagne en fait d'une modernisation : les avions Mirage IV-N sont remplacés par des Rafale à Saint-Dizier et le seront en 2018 à Istres. Les missiles nucléaires ASMP ont été remplacés par des nouveaux missiles ASMPA, de portée plus longue. Au total, ce sont 40 avions et 40 missiles qui sont opérationnels plus 10 avions et 10 missiles sur le porte-avions Charles-de-Gaulle. Cette "2e composante" a donc en fait été complètement modernisée. La validité de son existence est posée : elle n'a pas, quoiqu'en dise l'état-major, de véritable justification stratégique ou pré-stratégique. Ne pourrait-on craindre que, dans une éventuelle évolution de la doctrine nucléaire française, ces missiles prennent une vocation non dissuasive mais offensive dans une crise régionale ?
L'exigence que la diplomatie de désarmement française prenne en compte l'évolution de l'opinion publique qui demande à 81 % des initiatives pour la négociation d'une Convention d'abolition des armes nucléaires reste donc posée.
Après une suspension pour le 1er mai, la Conférence reprendra sa séance plénière mercredi, toujours avec des interventions générales des états. Par contre, la séance de l'après-midi verra un large moment consacré à l'écoute par les diplomates des représentants des ONG, qui exposeront leurs arguments et vision d'un monde sans armes nucléaires. Jeudi, la discussion générale sera dédiée aux différents aspects du pilier "désarmement" ("Cluster 1") du TNP.



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